Des affrontements ont lieu depuis le 12 novembre entre des quartiers rivaux à Mayotte. Insécurité, sentiment d’abandon, violence : quelle est la réponse de l’Etat français ?

Depuis la nuit du 12 au 13 novembre, la vio­lence fait rage à Mayotte, dépar­te­ment fran­çais depuis 2011. Le meurtre d’un jeune maho­rais à coups de machette a entrai­né des affron­te­ments entre des quar­tiers rivaux. Mer­cre­di 23 novembre, Emma­nuel Macron a ten­té de ras­su­rer la popu­la­tion locale, alors que le ministre de l’Intérieur, Gerald Dar­ma­nin, a annon­cé le déploie­ment du RAID. En effet, Amb­dil­wa­hé­dou Sou­mai­la, le maire de Mamoud­zou, parle de Mayotte comme « l’île aux enfers ». Il demande que les ren­forts du RAID res­tent « jusqu’à ce que la Répu­blique reprenne ses droits ». Il ne s’agit plus, selon lui, de sim­ple­ment « faire du main­tien de l’ordre » mais de « les com­battre, aller les cher­cher là où ils sont dans les bidon­villes, les quar­tiers recu­lés, les attra­per et les tra­duire en jus­tice ». L’archipel, théâtre régu­lier d’affrontements entre bandes ou avec les forces de l’ordre, connaît une délin­quance bien plus éle­vée qu’en France métro­po­li­taine. Cette insé­cu­ri­té se nour­rit d’une grande pau­vre­té : 194 000 Maho­rais, soit 74 % de la popu­la­tion, vivent avec un niveau de vie infé­rieur à 50 % de la médiane natio­nale, selon l’Insee.

Mayotte, bombe sociale à retardement ?

La popu­la­tion clan­des­tine est selon diverses esti­ma­tions égale à au moins 26% de la popu­la­tion totale. Ces clan­des­tins sont pour 95% consti­tués de Como­riens venus de l’union des Comores. Le géné­ral Lizu­rey avait décla­ré en 2017 : « la situa­tion de Mayotte consti­tue une bombe sociale qui explo­se­ra on ne sait pas quand mais cela arri­ve­ra ». Le pré­sident, inter­pel­lé mer­cre­di par des élus de l’archipel lors de sa visite du Salon des maires au Parc des Expo­si­tions,  a annon­cé « mettre plus de moyens mili­taires aus­si en mer pour pou­voir évi­ter les arri­vées », pré­ci­sant s’être entre­te­nu avec le pré­sident des Comores, Aza­li Assoumani.

Mayotte, eldorado pour les îles voisines

Mayotte, qui se situé à 8 000 km de la métro­pole, a été peu­plée par des vagues suc­ces­sives de migra­tion en pro­ve­nance d’Afrique, d’Asie du Sud et d’Arabie Saou­dite. Aujourd’hui, l’île fait figure d’eldorado pour les habi­tants de l’union des Comores qui se trouvent à envi­ron 70 km de là. A tra­vers son inté­gra­tion à la Répu­blique fran­çaise, Mayotte a béné­fi­cié de trans­ferts de fonds qui ont per­mis une aug­men­ta­tion rela­tive de son niveau de vie. Mais les habi­tants se sentent aban­don­nés par Paris. L’insécurité et la vio­lence sont per­ma­nentes : « on est au bord de la guerre civile », déclare la dépu­tée de Mayotte Estelle Youssouffa.

Dès lors, gar­der Mayotte per­met à la France d’as­su­rer sa pré­sence dans l’o­céan Indien et de gar­der sa place de deuxième zone éco­no­mique exclu­sive (ZEE). Mais c’est aus­si se confron­ter aux limites de la sou­ve­rai­ne­té fran­çaise, ébran­lée par les vio­lences et la pauvreté.