Les temps sont durs pour la gauche depuis le début de la campagne présidentielle. Les divisions sont fortes et aucun candidat ne parvient à dépasser la barre des 10 % d’intentions de vote. Quelques mois après le déclenchement de la primaire populaire à gauche, il semblerait qu’elle enthousiasme peu les foules, et contribue à multiplier encore le nombre de prétendants.

L’objectif d’une pri­maire est simple : per­mettre au can­di­dat dési­gné de se qua­li­fier au second tour de la pré­si­den­tielle. Depuis octobre 2020, Samuel Grzy­bows­ki réflé­chit à l’organisation de la pri­maire à gauche. L’en­tre­pre­neur social pro­pose un sys­tème ouvert. Au lieu d’avoir des can­di­dats décla­rés élus sur un pro­gramme, il sug­gère que mili­tants et sym­pa­thi­sants par­rainent la per­son­na­li­té la plus repré­sen­ta­tive de leurs idées, qu’il s’a­gisse par exemple de la défense de l’environnement, des droits LGBTQ ou du com­bat contre le racisme. En octobre der­nier, neuf per­son­na­li­tés ont été sélec­tion­nées dont trois déjà inves­ties par leurs par­tis : Jean-Luc Mélen­chon, Yan­nick Jadot et Anne Hidal­go. Depuis quatre ans, les grandes struc­tures ont du mal à mobi­li­ser les élec­teurs de gauche. L’i­ni­tia­tive de la pri­maire ouverte vient un peu tard et divise. Plu­sieurs can­di­dats de gauche déjà décla­rés comptent bien mener leur cam­pagne jusqu’au bout, tant qu’ils peuvent espé­rer faire plus de 5 %.

L’impossible union des gauches

La pers­pec­tive ouverte par Samuel Grzy­bows­ki séduit des intel­lec­tuels et des mili­tants. Mais l’initiative ne plaît pas aux can­di­dats, comme celui d’Eu­rope Eco­lo­gie les Verts, Yan­nick Jadot, déjà dési­gné par une pri­maire, qui pla­fonne pour l’ins­tant à 5 % des inten­tions de vote. Jean-Luc Mélen­chon, cré­di­té au mieux de 12 % des inten­tions de vote, refuse lui aus­si cette pers­pec­tive. Quant à Anne Hidal­go, elle n’a plus qu’à espé­rer que les mili­tants de gauche la choi­sissent, ce qui semble mal par­ti. Son pro­fil pari­sien fait fuir nombre d’électeurs, en témoigne son niveau actuel dans les son­dages : entre 4 et 5 %. La pos­sible can­di­da­ture de Chris­tiane Tau­bi­ra, sélec­tion­née par les élec­teurs de la pri­maire popu­laire, ne va pas faci­li­ter l’u­ni­té de la gauche. Reste à savoir si elle ose­ra faire le pas de se pré­sen­ter. Ses der­niers dépla­ce­ments en Ariège et ses attaques à pro­pos des pro­pos de la droite font croire que cette can­di­da­ture est presque offi­cielle. Elle annon­ce­ra si oui ou non elle fait ce pas le 15 jan­vier prochain.

Le problème de la gauche : les idées

Cer­taines per­son­na­li­tés comme Manuel Valls affirment que la déprise de la gauche est due à son revi­re­ment idéo­lo­gique. Depuis quelques années, elle centre ses luttes exclu­si­ve­ment sur le plan socié­tal et envi­ron­ne­men­tal, et délaisse ses com­bats tra­di­tion­nels : la défense des droits des ouvriers et des sala­riés, ou des per­sonnes à reve­nu modeste. Ce sont désor­mais des causes cultu­relles qui la pré­oc­cupent : l’é­co­lo­gie, le wokisme et la can­cel culture, les droits LGBTQ, ou la fin du nucléaire. Mais ces sujets répondent-ils vrai­ment aux pré­oc­cu­pa­tions des Fran­çais ? La gauche s’é­loigne du peuple depuis trop long­temps, alors qu’elle a tou­jours pré­ten­du le repré­sen­ter. Sans doute que la grève de la fin, enta­mée le 5 jan­vier par le pré­sident de Nou­velle Donne et can­di­dat sélec­tion­né à la Pri­maire popu­laire, Pierre Larou­tu­rou, avec une dizaine d’autres mili­tants, ne suf­fi­ra pas pour convaincre les can­di­dats de gauche à s’u­nir non plus. Il ferait peut-être mieux de man­ger à sa faim, et de pro­po­ser des idées qui dépassent, si pos­sible, la ques­tion du réchauf­fe­ment cli­ma­tique, son prin­ci­pal che­val de bataille depuis une dizaine d’an­nées. Peut-être que le can­di­dat sélec­tion­né les 27 et 30 jan­vier pro­chains à la pri­maire popu­laire sau­ra com­prendre ce pro­blème. En tous cas, la Pri­maire popu­laire ne semble pas être la solu­tion pour renou­ve­ler la gauche.