Eclipsé par l’assassinat de Samuel Patty, un attentat terroriste syrien rappelle à qui l’avait oublié que le terrorisme est un fléau mondial

 

Syrie, 22 octobre. Jeu­di der­nier, Adnane al-Afyou­ni, muf­ti de 66 ans qui avait beau­coup œuvré au ces­sez-le-feu dans la pro­vince de Damas, est mort dans un atten­tat à la voi­ture pié­gée. Il se trou­vait à Qoud­saya, ville au nord-ouest de Damas, pour un forum sur la média­tion et la récon­ci­lia­tion. C’est là qu’une bombe a été pla­cée à l’intérieur de son véhi­cule. SANA, agence de presse syrienne, a relayé l’information en dénon­çant une attaque ter­ro­riste. Il était consi­dé­ré comme proche de Bachar al-Assad.

Adnane al-Afyou­ni était muf­ti de Damas et de sa ban­lieue depuis 2013. Lors de la révo­lu­tion syrienne, le res­pon­sable reli­gieux avait dénon­cé le ter­ro­risme et qua­li­fié les appels au dji­had de « mal­veillants ». Pour lui, le régime syrien ne com­bat­tait pas des rebelles mais « le ter­ro­risme et l’extrémisme ». En 2019, il était nom­mé super­vi­seur géné­ral  du Centre inter­na­tio­nal isla­mique al-Cham pour la lutte contre l’extrémisme. Quelques mois plus tard, il consi­dé­rait l’immigration des Syriens en Europe comme « juri­di­que­ment inva­lide », et pro­cla­mait une fat­wa. Il appe­lait les réfu­giés à ren­trer au plus vite et à « par­ti­ci­per acti­ve­ment à la recons­truc­tion du pays ». Renom­mé dans l’ensemble du monde musul­man, il s’était ren­du dans plu­sieurs de ces pays pour amé­lio­rer leurs rela­tions avec le régime syrien.

En 2016, Bachar al-Assad était venu à Daraya et Adnane al-Afyou­ni avait pré­si­dé la prière à la mos­quée. Or, Daraya était une ville rebelle impor­tante que les insur­gés venaient d’évacuer suite à un accord avec le régime. Adnane al-Afyou­ni était à la tête de la délé­ga­tion en charge de cet accord. A l’occasion de la venue de Bachar al-Assad, le muf­ti avait décla­ré que Daraya devait être un exemple pour  « la récon­ci­lia­tion entre tous les Syriens et l’abandon des com­bats ». Appel qui n’allait pas dans le sens de Daesh, oppo­sé au gou­ver­ne­ment. Depuis 2018, le régime a repris le contrôle de 70 % du ter­ri­toire syrien et les attaques se font rares.

Adnane al-Afyouni était considéré comme l’un des acteurs les plus importants du monde musulman et bénéficiait d’une légitimité sur un plan théologique. Cette attaque contre un acteur éminent des accords entre le gouvernement et les rebelles est donc de première importance pour Daesh. Pour autant, l’attaque n’a pas encore été revendiquée, mais les terroristes wahabites sont fortement soupçonnés.