Au Vene­zue­la, Juan Guai­do vient d’an­non­cer l’en­voi d’une délé­ga­tion à Washing­ton. L’op­po­sant le plus connu veut faire lever les sanc­tions inter­na­tio­nales frap­pant le pays depuis plus d’une décen­nie. En échange, il sou­haite obte­nir des conces­sions de la part du pré­sident Nico­las Madu­ro. Ce revi­re­ment s’im­po­sait pour l’op­po­si­tion véné­zué­lienne, aus­si dis­cré­di­tée que le régime qu’elle combat.

Plus de deux ans après s’être auto­pro­cla­mé pré­sident de la Répu­blique, Juan Guai­do est for­cé d’ad­mettre son échec : l’op­po­si­tion démo­cra­tique, dont il se veut le repré­sen­tant, n’a pra­ti­que­ment rien obte­nu du régime. De son côté, Nico­las Madu­ro, pré­sident effec­tif du Vene­zue­la, dirige le pays d’une main de fer. Cette impasse poli­tique fait souf­frir les Véné­zué­liens, plus que jamais résignés.

Le régime de Madu­ro accuse Juan Guai­do et ses proches de com­plo­ter avec des puis­sances étran­gères, Etats-Unis en tête, pour étouf­fer le Vene­zue­la. A cause des embar­gos, le pays manque de tout, et son éco­no­mie est très peu diver­si­fiée. L’hy­per­in­fla­tion n’a rien arran­gé et laisse 80 % des habi­tants en situa­tion de pau­vre­té extrême. Enfin, le COVID-19 a été un coup de mas­sue, même si les auto­ri­tés affichent des résul­tats exem­plaires dans la lutte contre la pandémie.

En mai, pour sor­tir de l’im­passe, Juan Guai­do a par­lé d’une reprise des dis­cus­sions avec Nico­las Madu­ro : l’op­po­si­tion veut obte­nir un calen­drier d’é­lec­tions, dont la pré­si­den­tielle, en échange d’une « levée pro­gres­sive » des sanctions.

Les oppo­sants au régime changent encore de stratégie 

Depuis l’ar­ri­vée de la gauche véné­zué­lienne au pou­voir en 1999, l’op­po­si­tion oscille entre deux atti­tudes : la vic­toire par les urnes ou le coup d’É­tat. Aucune d’elles n’a fonc­tion­né. L’op­po­si­tion s’est non seule­ment divi­sée, mais elle a aus­si per­du en cré­di­bi­li­té. Juan Guai­do, prin­ci­pal adver­saire du diri­geant socia­liste, a récem­ment vu sa cote de popu­la­ri­té s’ef­fon­drer à 20% d’o­pi­nions posi­tives. Les autres membres de l’op­po­si­tion ne font pas mieux, notam­ment après une défaite écra­sante subie lors des légis­la­tives de décembre.

S’il conserve le pou­voir, le régime de Madu­ro est très fra­gi­li­sé par les sanc­tions inter­na­tio­nales et une éco­no­mie exsangue. Juan Guai­do sait que l’op­po­si­tion a un moyen de pres­sion : « Il y a clai­re­ment un inté­rêt du régime pour la levée pro­gres­sive des sanc­tions (…). Cela fait par­tie des élé­ments sur les­quels nous tra­vaillons avec nos alliés. », a‑t-il déclaré.

Une pos­sible levée des sanc­tions internationales 

Nico­las Madu­ro s’est dit prêt à ren­con­trer l’op­po­si­tion « quand elle veut, où elle veut et comme elle veut ». Comme pre­mier point à négo­cier, il a exi­gé « la levée immé­diate de toutes les sanc­tions » contre le Vene­zue­la. En août 2019, le diri­geant socia­liste avait mis fin aux pour­par­lers enga­gés avec l’op­po­si­tion, et dénon­cé les sanc­tions éco­no­miques impo­sées par les États-Unis, prin­ci­pal sou­tien inter­na­tio­nal de Juan Guai­do. Depuis la vic­toire de Joe Biden, Nico­las Madu­ro change de dis­cours et envi­sage de renouer des rela­tions diplo­ma­tiques avec les États-Unis.

La délé­ga­tion de Juan Guai­do devrait débu­ter sa tour­née à Washing­ton et la pour­suivre à Bruxelles, a indi­qué l’op­po­sant véné­zué­lien en confé­rence de presse, sans plus de détails. À Washing­ton entre le 21 et le 25 juin, elle doit ren­con­trer des membres du gou­ver­ne­ment et des par­le­men­taires US. Défi périlleux pour Juan Guai­do : il devra convaincre l’A­mé­rique de lever les sanc­tions, et Nico­las Madu­ro de faire des concessions.