Réunis en assemblée générale vendredi 18 juin, les salariés d’Europe 1 ont décidé de se mettre en grève jusqu’à lundi. Les journalistes invoquent la mise à pied injustifiée d’un de leurs collègues et souhaitent surtout protester contre l’arrivée de Vincent Bolloré à la tête du média. 

Europe 1 est en grève ? Les audi­teurs de la sta­tion ne l’ont pas enten­du. Mal­gré l’ar­rêt du tra­vail déci­dé par le per­son­nel ven­dre­di, les émis­sions se sont suc­cé­dées sans accrocs ce week-end. Cela est dû au sta­tut des sala­riés qui tiennent la sta­tion en fin de semaine. D’après les infor­ma­tions du Figa­ro, ce sont essen­tiel­le­ment des CDD et des pigistes. L’AG tenue ven­dre­di qui a voté le mou­ve­ment de pro­tes­ta­tion, a conseillé aux sala­riés les plus pré­caires de ne pas se mettre en grève par peur de représailles.

Ce mou­ve­ment de contes­ta­tion arrive après la mise à pied d’un rédac­teur de la sta­tion et l’ar­ri­vée de Vincent Bol­lo­ré aux com­mandes d’Eu­rope 1. Per­çu comme trop à droite par les jour­na­listes de la rédac­tion, l’arrivée aux manettes du pro­prié­taire de CNews et son pro­jet édi­to­rial n’étonnent pas Éme­ry Doli­gé, un ancien de la mai­son qui a tra­vaillé à un pro­jet de nou­velle grille en 2018. Dans un texte publié sur les réseaux sociaux, il déplore « que Europe 1 soit deve­nue la radio des CSP+ urbains ». Il rap­pelle l’i­den­ti­té d’o­ri­gine de cette sta­tion : « Avant les années 80, Europe 1 était la radio de la rue, des petits com­mer­çants, des pou­ja­distes et autres contes­ta­taires. »  En conclu­sion, il estime que le pré­vi­sible virage à droite d’Eu­rope 1 est per­ti­nent : « nous le consta­tons à chaque élec­tion. La place est béante ».

À Europe 1, les départs s’amoncellent

Mais tout le monde ne par­tage pas l’a­na­lyse d’É­me­ry Doli­gé. Ven­dre­di 18 juin, les sala­riés de la sta­tion ont déci­dé de de se mettre en grève au moins jusqu’à lun­di. La cause ? Une alter­ca­tion très viru­lente le 16 juin entre un jour­na­liste et une employée des res­sources humaines qui enre­gis­trait les dis­cus­sions en assem­blée géné­rale. Selon les témoins de la scène, les pro­pos étaient « véhé­ments mais pas insul­tants ». Peu importe, le jour­na­liste a été mis pied pour 10 jours par la direc­tion de la radio. Cette déci­sion a sus­ci­té un fort émoi dans la rédac­tion, et l’intersyndicale CGT, CFTC, FO, SNJ a déci­dé de se mettre en grève. Les sala­riés jus­ti­fient leur déci­sion dans un com­mu­ni­qué de presse publié ven­dre­di. Ils dénoncent « un mana­ge­ment auto­ri­taire et inadap­té à l’oeuvre à Europe 1 ». Pour le moment les syn­di­cats n’indiquent pas s’ils vont recon­duire la grève. Une réunion devra se tenir lun­di pour déter­mi­ner la suite de ce mou­ve­ment  protestataire.

L’arrivée de Vincent Bol­lo­ré, prin­ci­pal action­naire de Lagar­dère News — un groupe de presse dont fait par­tie Europe 1, mais aus­si Paris Match ou le JDD - sus­cite aus­si la méfiance des sala­riés de la radio. L’homme d’affaires bre­ton détient actuel­le­ment 27 % des parts de l’entreprise. Ce n’est pas la majo­ri­té mais c’est suf­fi­sant pour impo­ser ses vues.

Dans ce cli­mat délé­tère, de nom­breuses têtes d’affiche de la sta­tion ont déci­dé de quit­ter Europe 1, comme le pré­sen­ta­teur de la mati­nale, Mat­thieu Bel­liard. Il sera rem­pla­cé par Dimi­tri Pav­len­ko, chro­ni­queur dans l’émission Face à l’Info à laquelle par­ti­cipe aus­si Éric Zem­mour. D’autres départs ont aus­si été annon­cés : comme la jour­na­liste Pas­cale Clark, l’humoriste Chris­tine Ber­rou ou encore Julian Bugier.