Sur fond de retour à une forme de démocratie participative, Emmanuel Macron a confié le sujet de la fin de vie à une conférence citoyenne qui doit rendre ses conclusions fin mars.

La fin de vie en France est un sujet déli­cat à mani­pu­ler. Emma­nuel Macron l’a bien com­pris, et pour bri­ser le tabou, il a pré­fé­ré orga­ni­ser début décembre une confé­rence citoyenne. A la ques­tion d’Elisabeth Borne, « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie répond-il aux dif­fé­rentes situa­tions ren­con­trées ou d’éventuels chan­ge­ments doivent-ils être intro­duits ? », les 185 par­ti­ci­pants ont majo­ri­tai­re­ment répon­du « oui ». Quatre mois ponc­tués de 9 ses­sions de débats menés par le Conseil éco­no­mique, social et envi­ron­ne­men­tal (CESE). Faut-il favo­ri­ser l’aide active à mou­rir en esti­mant que pro­vo­quer la mort du patient est le meilleur soin qu’il puisse rece­voir ou faut-il son­ger sérieu­se­ment au déve­lop­pe­ment mas­sif des struc­tures de soins palliatifs ?

Un président indécis

Por­tée par l’exécutif, cette manœuvre citoyenne illustre bien l’urgence et le manque d’organisation dans le camp Renais­sance. Pour le com­prendre, il faut remon­ter à la genèse du pro­jet. Lors de son pre­mier quin­quen­nat, Emma­nuel Macron s’était mon­tré très éva­sif sur la fin de vie, se conten­tant de relan­cer un plan de déve­lop­pe­ment des soins pal­lia­tifs. Une manière de répa­rer la fuite avec un mau­vais ruban adhé­sif. Comme pour d’autres sujets, la période du Covid a relan­cé les débats. L’année der­nière, l’Assemblée natio­nale avait étu­dié une pro­po­si­tion de loi du camp Renais­sance « pour le droit à une fin de vie libre et choi­sie ». La pro­po­si­tion avait recueilli un large sou­tien des dépu­tés de la majo­ri­té mais n’avait pu être votée dans les temps.

Cette issue n’avait pas contra­rié Emma­nuel Macron outre mesure. Depuis que la ques­tion d’une ouver­ture à une aide active à mou­rir lui a été posée, le loca­taire de l’Elysée danse sur un pied, puis l’autre. S’il n’est pas oppo­sé à la léga­li­sa­tion du sui­cide assis­té et de l’euthanasie sur le modèle défen­du par la Bel­gique, le pré­sident sou­haite néan­moins sou­mettre la ques­tion au débat démo­cra­tique. D’où ces quelques lignes dans son pro­gramme pour l’é­lec­tion pré­si­den­tielle de 2022, invi­tant à la consti­tu­tion d’une confé­rence citoyenne, qui jet­te­rait les bases d’un pro­jet de loi du gou­ver­ne­ment en avril prochain.

Devant ceux qui sou­haitent le son­der plus en pro­fon­deur, Emma­nuel Macron entre­tien ce fameux « en même temps » qui l’accompagne (trop) sou­vent. En pré­sence des repré­sen­tants des cultes, il se contente d’introduire les débats et de conclure, sans jamais en dire trop. En sep­tembre der­nier, il s’était entre­te­nu avec l’actrice Line Renaud, mar­raine de l’Association pour le droit de mou­rir dans la digni­té (ADMD), qui inci­tait le pré­sident à léga­li­ser l’aide active à mou­rir. Emma­nuel Macron lui avait assu­ré que la loi chan­ge­rait. Mais le mois sui­vant, après une visite au pape Fran­çois, le patron de Renais­sance s’était mon­tré plus pru­dent devant le Saint-Siège : « Le pape sait que je ne ferais pas n’importe quoi. » Le 9 décembre, la pre­mière ses­sion de la conven­tion citoyenne sur la fin de vie est le moyen pour Emma­nuel Macron de se déres­pon­sa­bi­li­ser d’un sujet sen­sible. Pour l’heure, cette assem­blée de citoyens s’est pro­non­cée en faveur de l’aide active à mou­rir, y com­pris pour les mineurs et les per­sonnes dont le pro­nos­tic vital n’est pas engagé.