Selon la présidence égyptienne, l’objectif de la COP27 est de passer des paroles aux actes. Le gouvernement français prend de nombreux engagements. Mais la lisibilité des objectifs et des actions concrètes est brouillée par la multiplication des bonnes paroles.
« Matérialiser les engagements historiques des Accords de Paris », voici l’objectif de la COP27 selon l’ONU. Les quatre axes majeurs de la conférence étaient la réduction des émissions de gaz à effets de serre, l’adaptation aux changements climatiques inéluctables, le financement de la transition écologique et la prise en compte des pertes et préjudices. Lors de sa prise de parole au deuxième jour de l’évènement, Emmanuel Macron a enchaîné les promesses. Il a par exemple annoncé un investissement d’un milliard d’euros en Afrique du Sud pour aider à la transition énergétique, ou une participation à hauteur de 20 millions d’euros par an à un bouclier global contre les risques climatiques. Le président promeut l’image verte de la France à l’international et organise des évènements à son initiative. Par exemple, le rassemblement « One Planet », consacré à la conservation des espaces riches en carbone et en biodiversité, qui s’est tenu le 7 novembre à la COP27. L’Accord de Paris signé en 2015 par la France implique des actions concrètes sur le territoire national. Quelles ont-été les véritables conséquences des COPs successives sur la politique intérieure française, au-delà de ces stratégies d’affichage ?
L’Accord de Paris – Ce pour quoi la France a signé
Lors de la COP21, en 2015, les 193 pays signataires ont choisi un seuil maximal de 1,5°C de réchauffement à ne pas dépasser. Chaque partie a décidé de contributions déterminées au niveau national (CDN). L’Europe s’est engagée à réduire ses émissions de 40% d’ici 2030, la France à réduire ses émissions de 3,2% par an. Depuis 2010, la diminution effective de ses émissions est en moyenne de 1,7% par an. Le budget carbone de 2015–2015 a été bien dépassé, celui de 2019–2023 est pour l’instant respecté grâce à la crise sanitaire et au relèvement du budget en 2020. Selon le Haut conseil sur le climat, parmi les 25 orientations sectorielles de la Stratégie nationale bas carbone votée en 2015, 6 sont couvertes par des mesures au niveau requis pour l’atteinte des objectifs, 15 par des mesures « très sûrement insuffisantes », 4 par des mesures apparaissant en déphasage avec les objectifs de la loi.
Des lois ambitieuses pour le climat sont mises en avant
Car les objectifs que se donne le gouvernement sont nombreux. Outre la réduction des émissions des gaz à effets de serre de 3,2% par an, l’exécutif s’est engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour cela, des chiffres ambitieux sont affichés. Par exemple la France devrait compter 40% d’énergies renouvelables dans la production d’électricité en 2030 ou zéro émissions dans les transports et le bâtiments en 2050. Le Parlement a aussi voté des lois en faveur de l’alimentation durable ou de la “reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages”. La dernière en date est la loi Climat et résilience votée en 2021 d’après les travaux de la convention citoyenne pour le climat.
Les intentions exposées par le gouvernement semblent louables. Par exemple, la loi sur la reconquête de la biodiversité votée en 2016 instaure le principe de “solidarité écologique” entre la biodiversité et les activités humaines. Beaucoup de directives sont données, comme le soutien aux métiers de l’économie verte ou la prise en compte de la biodiversité dans les choix publics et privés. Des comités sont créés pour “réaffirmer que la biodiversité est l’affaire de tous”. Comment comprendre ce que ces paroles impliquent concrètement pour les Français ? Une des manières de le savoir est de consulter la part du budget de l’État consacrée à l’écologie.
Quel est le budget climat de l’État ?
Selon le Ministère de la Transition écologique, 83,8 milliards ont été investis dans le climat en 2021. Ce chiffre concerne l’État, les ménages et les entreprises. En revanche la part du budget général de l’État consacrée à la mission «écologie, développement et mobilités durables » est de 6,4% en 2021. Mais cette mission comprenait par exemple la subvention du gazole pour certains véhicules de transport de marchandises. Afin de mesurer l’impact environnemental réel des dépenses de l’État, le “budget vert” est réalisé tous les ans depuis 2020 par les ministères de la Transition écologique et de l’Économie. Selon ces calculs, 6,6% des dépenses prévues par le budget 2021 sont « vertes ». “Vertes” signifie qu’elles ont un effet positif certain sur l’environnement. En comparaison, 1,7% des dépenses ont un impact négatif.
Dans la vie quotidienne des Français, cela se traduit surtout par l’aide à la conversion automobile ou à la rénovation énergétique. Un autre axe majeur est le soutien aux énergies renouvelables. L’action de l’État ce ne sont pas que des aides. Les Français devront aussi se contraindre à de nouvelles règlementations, comme l’interdiction de louer des logements mal isolés ou le bannissement de certains véhicules des centres-villes.
L’application des grands principes écologiques défendus par l’État semble tout de même relever pour une grande part des particuliers ou des communautés locales. Des dépenses et mesures aux effets concrets sont bien mises en œuvre. Mais l’idéalisme développé dans les discours et les lois reste éloigné de ce que l’on peut vraiment attendre de l’État.
L’Europe a relevé ses objectifs l’année dernière : ‑55% d’émissions d’ici 2030. A la COP27, elle a fait un geste symbolique en les remontant encore de 2%. La France devra donc elle aussi revoir ses objectifs à la hausse, peu importe leur réalisme. «Notre devoir, c’est un devoir d’action. Il faut remettre l’environnement au cœur de l’économie», a affirmé notre président.