68% des Français approuvent le mouvement social contre la réforme des retraites, dont l’inutilité est arguée par les opposants. Pourquoi ce flou autour du bien fondé financier de la réforme ?
Comme l’a souligné Rachida Dati au micro de France Inter, les Français sont égarés par des déclarations contradictoires et la communication « erratique » du gouvernement. Emmanuel Macron a par exemple affirmé que le budget libéré par la réforme permettrait d’investir dans d’autres domaines, comme la transition écologique. Donc la réforme permettrait de faire des économies et non de sauver le système ? Les déclarations de Pierre-Louis Brau, président du Conseil d’orientation des retraites (COR) entretiennent le doute.
Que dit le COR sur la réforme des retraites ?
Chaque partie lit le rapport du COR selon son positionnement politique. Les résultats de l’analyse peuvent en effet servir des discours contradictoires. Le rapport conclut en affirmant que « les résultats (…) ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite ». Il montre que le ratio dépenses des retraites sur le PIB sera stable ou en diminution dans les prochaines années. Lors de son audition devant les députés le 19 janvier, le président du COR a confirmé l’analyse des pourfendeurs de la réforme : « Les dépenses de retraite ne dérapent pas », a‑t-il affirmé. Le gouvernement serait-il en train de tromper les Français ? Avec un déficit budgétaire de 171 milliards d’euros, il ne serait pas étonnant que le gouvernement cherche à grappiller un peu d’argent dans les tirelires des seniors. Néanmoins l’argument financier n’est pas à rejeter sans considération. Si la part des dépenses de retraites sur le PIB reste stable, le déficit lui ne va pas tarder à se creuser. Dans une dizaine d’années, il devrait atteindre 0,5 à 0,8 % du PIB, soit environ 20 milliards sur les 330 milliards consacrés chaque année aux retraites. Ce qui n’est plus financé par les cotisations, bientôt insuffisantes du fait de la baisse du nombre d’actifs par retraité, devra l’être par d’autres moyens. Il faut aussi préciser que la stabilité de la part du PIB consacrée aux retraites prévue par le COR se fait au prix d’une baisse du niveau de vie relatif des retraités.
Une réforme nécessaire mais pas urgente
L’argument financier est donc bien justifié. Le système par répartition est pensé pour que les cotisations des actifs suffisent à financer les retraites, sans que l’État ait besoin de combler les « trous ». En revanche, l’urgence défendue par le gouvernement reste un argument rhétorique. Le système a besoin d’être réformé mais ne court pas un risque imminent de faillite.
Quels que soient les arguments et les solutions avancés par les différents partis, les dysfonctionnements mis à jour nous obligent à repenser notre modèle social.