Jubilé d’Elizabeth II : à Saint-Paul, l'Angleterre fait l'éloge de sa souveraine

Vendredi 3 juin, à la cathédrale anglicane Saint-Paul de Londres, un office religieux rendit hommage à la reine Elizabeth II pour ses 70 ans de règne. 

Ce fut une cérémonie religieuse très solennelle, en présence d'une quarantaine de membres de la famille royale ainsi que des anciens Premiers ministres Theresa May, David Cameron, Gordon Brown et Tony Blair. Certes, la reine était absente. A 96 ans, la souveraine souffrait d’« inconfort » au soir du deuxième jour des célébrations officielles de son jubilé de platine. Le prince Charles, héritier de la Couronne, était à la place d'honneur, avec son épouse Camilla à ses côtés. William et Kate étaient aussi au rendez-vous, sans leurs trois enfants cette fois-ci. Harry et Meghan, arrivés du Canada mercredi, durent se contenter du second rang dans la nef, au même titre que leurs cousins. Quant au propre fils de la reine, le prince Andrew, testé positif au coronavirus et pris dans le scandale de l'affaire Epstein, les media britanniques préférèrent ne pas trop commenter son absence.

Silencieuse mais pas muette

Le célébrant n'était autre que l’archevêque de York, le Révérendissime (The Most Reverend) Stephen Cotrell, deuxième dans le rang protocolaire après l’archevêque de Canterbury. Dans son homélie, le religieux salua en Elizabeth II, chef de l'Eglise d'Angleterre, l’exemple « d’une loyauté fidèle et d’une inébranlable cohérence ; d’une fidélité à Dieu, d’une obéissance à la vocation qui est le socle de sa vie ». Au service de son peuple, la souveraine sut s’adapter aux nombreux changements de société, en continuant d'incarner l'institution. La reine n’est pas souveraine de droit divin, mais par l’accident de la naissance. Elle est choisie par Dieu pour régner sur la Grande-Bretagne et le Commonwealth. L’archevêque de Canterbury loua cette vocation, vécue très fidèlement. Un paradoxe, pourrait-on dire, puisqu’elle brilla surtout par son silence durant 70 ans. Mais un silence qui parle propre au statut de la monarchie britannique, laquelle commande de régner et non gouverner, d'être un guide moral et spirituel, d'assurer la continuité, et de se situer au-dessus des controverses politiques. Un rôle pleinement accompli, auquel l’archevêque fit référence via le vocabulaire de l’équitation, loisir préféré du monarque : « Votre Majesté, nous regrettons que vous ne soyez pas physiquement parmi nous ce matin, mais sommes si heureux que vous soyez toujours en selle (in the saddle). Et nous sommes tous ravis qu’il y ait encore plus à venir. »

Une foi mise à l'épreuve

La foi d'Elizabeth II fut l’autre élément central du sermon : « Je n’ai pas honte de dire que je me repose sur Jésus Christ, que j’essaie de vivre près de son cœur. [...] Et vous me pardonnerez une telle présomption, c’est ce que vois aussi dans Sa Majesté la Reine », souligna l'archevêque d'York. Une foi que la reine ne cache jamais et qu’elle manifeste en particulier au moment de Noël, profitant de son message annuel pour tirer une leçon morale de la naissance de Jésus. Sa foi, la reine ne la vivait pas seulement en paroles mais aussi en actes. Le révérend Stephen Cotrell conclut sur ces mots : « Ce que je vois dans Sa Majesté la Reine, c’est quelqu’un qui a été capable de servir fidèlement notre nation, grâce à sa foi en Jésus-Christ. » De fait, il lui fallut beaucoup d'abnégation pour servir l'Angleterre pendant si longtemps, en particulier pour surmonter le déclin et les épreuves, de la fin de l'empire britannique à la mort de Lady Di et jusqu'aux turpitudes de ses fils.


Jordanie : ces réfugiés chrétiens qui ne veulent plus de l’Orient

Depuis 2014, des milliers de chrétiens ont fui les persécutions de Daesh en Irak. Peu espèrent retrouver leur terre; le plus grand nombre tente de se faire une place dans les pays limitrophes, en rêvant d’Occident et de paix. Helen, volontaire en Jordanie pour l’association SOS Chrétiens d’Orient, est de ceux-là.

Février 2022 : le mois s’achève à peine quand je rejoins la Jordanie. Je dois y assurer la réception d’une cargaison de donations bretonnes acheminées jusqu’au port d’Aqaba par le porte-hélicoptères amphibie français « Mistral ». Cette opération à quatre mains entre la Marine nationale et l’association SOS Chrétiens d’Orient vise à aider les réfugiés chrétiens d’Irak installés à Amman depuis plusieurs années. Au-delà du défi logistique, l’intérêt de ma mission résidait aussi dans le témoignage des déplacés. Au fil de longues discussions, je mesure la détresse de ces chrétiens persécutés, pour qui l’avenir ne s’écrit plus au Proche-Orient.

Helen est volontaire. Elle est à la fois mon « fixeur » et mon interprète. Cette trentenaire, architecte de formation, vit depuis huit ans avec ses parents et ses deux sœurs dans un petit appartement de la basse-ville d’Amman. Auparavant, elle habitait Bagdad avec sa famille. Même si l’environnement est plus calme qu’en Irak, c’est un cul-de-sac. « Il n’y a aucunes opportunités », se désole-t-elle. En quelques jours de présence, nous avons pu échanger – en anglais – sur le chemin qu'elle a suivi avant d'arriver ici. J’ai pu la convaincre de me raconter son histoire par écrit. Ce qu'elle avait déjà fait auprès des services du Canada, pays qu'elle cherche à rejoindre.

« Ils ont menacé mon père »

Cette histoire, c’est aussi celle de bien d’autres personnes persécutées. Elle déferle dans les reportages, suscite la compassion, pousse à la prière des uns et aux dons des autres. Rien ne touche plus que la détresse. Il faut voir avec quel courage les chrétiens que j’ai rencontrés font face à leur situation. Ils ont 25, 30 ou 60 ans ; ils étaient étudiants en biologie, designer ou policier. Leur vie a basculé depuis l'arrivée de l'État Islamique.

De Bagdad, Helen se souvient : « On June 25, 2016, I was surprised by three armed masked men barging in our house. » L’irruption dans la maison familiale de ces trois hommes armés reste gravée dans son esprit comme la première image de la chasse aux chrétiens organisée dans la capitale Irakienne. « Ils ont menacé mon père, l’obligeant à quitter la ville avant la fin de la semaine », écrit-elle. La captivité et la mort attendent les réfractaires. La pression des milices fondamentalistes entrave la riposte des autorités. La peur règne alors au sein de la police, si bien que jamais elle ne se serait risquée à protéger les mécréants chrétiens. Or, cinq jours après les menaces, la famille d’Helen est réveillée par un bruit fracassant. « Nous avons vu les mêmes terroristes armés détruire la clôture de la maison et ils ont continué à nous menacer en disant que nous n'avions que deux jours pour partir, sans quoi ils mettraient en œuvre leurs menaces. » Sa famille fuit alors chez un parent au nord de Bagdad, puis chez un ami. Mais là encore, les humiliations et le harcèlement se poursuivent. Il faut partir, quitter définitivement l’Irak pour la Jordanie. Ce récit me rappelle une autre réalité, celle de ces chrétiens fichés à Mossoul par l’Etat Islamique. La lettre n, le noun arabe, était inscrite au fronton de leurs habitations, afin que chacun sût que des « Nazaréens » ou chrétiens s'y trouvaient.

Au début, j'ignorais tout du parcours d'Helen. Mais l’état d’esprit des personnes traquées se décèle dans un millier de détails anodins. Dans le taxi qui me menait à l’hôtel, après une longue journée, elle préféra passer de l’anglais à espagnol pour que le chauffeur ne pût comprendre ce que nous disions. Cette prudence m'étonna : que pourrait bien faire le chauffeur de mon test PCR négatif ? « Es mejor que no entienda nada » (c’est mieux qu’il ne comprenne rien), répondit-elle.

Les espoirs déçus

D'Aqaba jusqu'à Amman, il faut entre 4 et 5 heures. Le paysage est monotone, sableux, chaud, ponctué de stations-services et de magasins improbables. Ce trajet me permet de vérifier certains points du témoignage d’Helen auprès de mon chauffeur, Melad, et de son frère jumeau, tous deux réfugiés à Amman. Quatre heures d’échange passionnants, dans un anglais approximatif. Ils m’expliquent pourquoi on voit partout des maisons inachevées d'où dépasse du béton un treillage métallique. C'est comme en Grèce : en faisant ainsi, les Jordaniens ne paient pas de taxe d’habitation. Ils m’éclairent aussi sur l'origine de l’étrange chapelet sans croix que l’on voit à la main de tout musulman. L'objet n'a rien d'un chapelet ; c'est un passe-temps venu des Kabyles des premiers siècles. Rien de musulman donc, seulement une coutume préislamique.

Les splendeurs du golfe d’Aqaba ne suffisent pas à faire oublier l’Irak. Melad et son frère n’en peuvent plus de voir leurs espoirs déçus. S’acharner à vouloir rester sur une terre qui est pourtant la leur est plus suicidaire que courageux. Cette idée de guerre perdue habite les chrétiens et les pousse à s’expatrier. Mes deux accompagnateurs ont de la famille en Australie ; ils espèrent la rejoindre un jour. Trop de conflits, trop de souffrance privent les personnes persécutées et exilées d'une espérance, d'une foi en un avenir meilleur. SOS Chrétiens d’Orient ne prétend pas changer la donne mais veut redonner, par l’action humanitaire, l’envie à ces chrétiens d’être des bâtisseurs sur leurs terres. Vaincre la résignation, tout un programme !


Conservateurs, populistes et progressistes ? Le sens des mots décryptés par Olivier Dard

Pour être à la mode depuis 2017, il ne faut plus être de droite ou de gauche, mais assumer une pensée, une identité idéologique. Le second tour le montre : Marine le Pen et Emmanuel Macron ont une vision bien différente voire totalement opposée sur des sujets économiques et sociaux, mais aussi de la France en général. On retrouve un discours qui s'adresse aux classes populaires chez Marine le Pen face à un discours en faveur du « progrès » chez Emmanuel Macron. Olivier Dard, professeur à la Sorbonne en histoire des idées, et spécialiste des droites en France, nous donne un éclairage sur le positionnement idéologique des candidats.

Vous êtes le coauteur d’un récent Dictionnaire du progressisme[1], paru pendant la campagne présidentielle. Pourquoi un dictionnaire sur cette thématique ?

Lorsqu’on a fait le dictionnaire du conservatisme[2], on s’est rendu compte, Frédéric Rouvillois, Christophe Boutin et moi-même que chez Emmanuel Macron, il y a aujourd’hui deux ennemis : le conservatisme et le populisme. Par ailleurs depuis 2016, l'actuel président de la République se réclame ouvertement du progressisme. Il a répété cette affiliation sur le media en ligne Brut, le 8 avril dernier. La campagne de 2017 fut un nouveau tournant dans l’utilisation du terme progressiste. Mais le premier à mon sens – le plus récent – fut celui des débats sur le mariage pour tous en 2013, où les clivages « progressistes » contre « conservateurs » sont réapparus. Dans notre dictionnaire, nous cherchons à faire un panorama de l’utilisation de ce concept en politique et dans le langage médiatique.

Pourriez-vous nous faire un historique de ces deux termes ?

L’idée même de progrès d’abord, se développe surtout au XVIIIe siècle. La Révolution ensuite, reprend le concept à son compte, en cherchant à faire table rase du passé, de l’Ancien régime, et à créer une cité et un homme nouveaux. Le mot « progressisme » apparaît quant à lui en 1842 dans le dictionnaire des mots nouveaux, et s’oppose en France au terme « conservateur » à la fin du XIXe siècle. Les conservateurs désignent le camp monarchiste après 1875, lorsque légitimistes et orléanistes échouent définitivement à installer leur prétendant sur le trône de France. Attention, le mot « conservateur » date, lui, du début du XIXe siècle. Il désigne le titre de la revue Le Conservateur, dirigée par Châteaubriand à partir de 1816, qui contribue largement à la définition du terme.

Venons-en à la campagne présidentielle. Peut-on dire en ce sens qu’Emmanuel Macron incarne le candidat progressiste par définition ? Frédéric Rouvillois a publié un article intitulé « Macronie » ! Est-il possible de l’inscrire dans une lignée avec d’autres candidats aujourd’hui ?

Emmanuel Macron a accentué le dynamitage du clivage droite-gauche entre 2017 et 2022. Valérie Pécresse en a d’ailleurs fait l’aveu dans un entretien au Figaro le 12 avril dernier, en attribuant sa défaite au fait qu’Emmanuel Macron avait copié son programme. C’est une grave erreur à mon sens, parce qu’elle a fait la démonstration d’une faiblesse incontestable en avouant en fin de compte n’avoir presque aucune différence idéologique ou programmatique avec le président. La conclusion que j’en tire est que la droite républicaine gaulliste n’existe plus guère aujourd’hui, parce que n’ayant plus de socle idéologique propre.

A défaut de socle idéologique, les Républicains ont-ils encore un socle électoral ?

Non, et les 4,7% de Valérie Pécresse nous l’ont bien montré. L’échec des Républicains s’explique surtout par leur incapacité à choisir entre la branche conservatrice qui s’en est allée chez Éric Zemmour, et une branche progressiste, partie en grand nombre chez Emmanuel Macron. Aujourd’hui, le projet d’union de la droite et du centre que souhaitait opérer Nicolas Sarkozy avec l’UMP en 2007, et qu’il a poursuivi avec les Républicains en 2015, a tout simplement échoué. D’ailleurs, il suffit de voir comment ont voté les électeurs de l’ouest parisien, essentiellement préoccupés par les questions économiques, et très peu par les enjeux de société ou identitaires. Traditionnellement, ils votaient massivement LR. Dès 2017, leur vote du second tour était entièrement en faveur d’Emmanuel Macron. Ce qui s’est confirmé au premier tour de 2022.

Avec l’apparition d’un candidat comme Éric Zemmour, et déjà avec Marine le Pen, peut-on dire qu’il y a un retour de l’opposition entre candidats progressistes et conservateurs parmi les candidats ?

Le conservatisme chez Éric Zemmour est une question complexe. Aujourd’hui, il s’incarne essentiellement dans la figure de Marion Maréchal, qui pour beaucoup d’électeurs de droite, est une figure des valeurs conservatrices. Elle s’est en particulier illustrée lors des Manifs pour Tous entre 2013 et 2017, incarnant ainsi la branche conservatrice du Rassemblement national (ex-FN) de l’époque. Elle est d’une certaine manière à sa place chez Éric Zemmour, qui regroupe les anciennes grandes figures conservatrices des Républicains et du Rassemblement national. Il est certain que plus qu’une union des droites, il s’agit d’une nouvelle union des conservateurs autour d’un programme commun.

Peut-on opposer aujourd’hui dans l’électorat, comme le fait David Goodhart, les « anywhere » et « somewhere » ? Que veut-il dire par-là ?

Les « somewhere », ce sont les enracinés, ceux qui ne peuvent pas quitter leur ville ou leur village, par manque de moyens économiques. Ce sont souvent les électeurs de Marine le Pen ou de Jean-Luc Mélenchon. On pourrait associer les gilets jaunes à cette catégorie de la population par exemple. Ces personnes ont un travail modeste – employé, fonctionnaire territorial – et ont tout juste les moyens d’élever une famille. Leurs enfants vont bien sûr à l’école public du secteur. A l’inverse, les « anywhere », ce qui se traduit par « les personnes venant de nulle part », sont les jeunes d’une sociologie mondialisée, scolarisés dans les centres-villes, ou en région parisienne, et qui ont les moyens de quitter la France pour faire une partie de leurs études, ou un stage. Ils se distinguent souvent par une meilleure maîtrise des langues étrangères, qui facilitent leur recrutement lors de leur première recherche d’emploi. La mise en avant de l’apprentissage des langues étrangères par Jean-Michel Blanquer dans sa dernière réforme de l’enseignement, vise particulièrement ce genre d’électorat issu des classes moyennes supérieures, plutôt favorable aux idées d’Emmanuel Macron.

 

[1] Frédéric Rouvillois, Olivier Dard, Christophe Boutin, Dictionnaire du progressisme, Cerf, 2022, 1234 p.

[2] Dictionnaire du conservatisme, Cerf, 2017, 1072p.


La politique économique comme principale atout de Marine Le Pen ? 

En se présentant comme la candidate du pouvoir d’achat, il y a près d’un an, Marine Le Pen a semble-t-il eu du flair politique. La question est aujourd’hui centrale dans un débat – certes phagocyté par la guerre en Ukraine. A la veille de sa rentrée politique en septembre dernier, la candidate du Rassemblement national annonçait deux mesures à caractère économique : la suppression de la contribution à l’audiovisuel public et la nationalisation des autoroutes si elle était élue présidente en avril 2022. Malgré des contradictions pas tout à fait aplanies, Marine Le Pen semble devoir tracer son sillon vers le second tour. 

Une appropriation des questions économiques par la droite patriote 

Le Front national d’hier, comme le Rassemblement national (RN) d’aujourd’hui, est trop souvent réduit à sa seule prise en compte des questions d’immigration, de sécurité, de mœurs. C’est oublier que la notion de souveraineté économique, aujourd’hui déclinée à l’envi par les membres de la majorité présidentielle comme par une certaine gauche souverainiste, est une déclinaison naturelle de celle de préférence nationale, qui fonde l’idéologie défendue par le RN depuis ses débuts. Si ces sujets sont, de longue date, défendus par les élus du mouvement au contact direct des Français, le moment était venu pour Marine Le Pen de s’en emparer ouvertement en vue de la présidentielle de 2022.

Car, dans le même temps, les prétendants à la candidature suprême s’approprient de plus en plus ouvertement le corpus idéologique qui fait du RN le seul mouvement politique authentiquement populaire et patriote. Il est plus que jamais temps, pour Marine Le Pen, d’affirmer la singularité du RN face à ceux qui s’approprient ses idées tout en feignant de le combattre. Même Fabien Roussel, candidat communiste à la présidentielle de 2022, a fait de la sécurité l’une des priorités de sa campagne 

A un peu plus de six mois seulement de l’élection présidentielle, Marine Le Pen a donc réussi à imposer ses thèmes dans le débat. Reste pour elle à s’imposer sur les sujets économiques afin que l’électorat patriote ne subisse pas un bis repetita de 2017. La candidate RN, opposée à l’actuel président lors du traditionnel débat d’entre-deux-tours, n’avait pas réussi à imposer sa ligne directrice sur les sujets économiques. En face d’elle, un Emmanuel Macron façonné par la finance internationale et la droite libérale avait déroulé aux Français un rassurant exposé européiste, libre-échangiste et dérégulateur. La persistance du chômage de masse ou l’augmentation du taux de pauvreté des Français ont confirmé, si cela était encore nécessaire, l’impasse de cette idéologie. Le temps est peut-être venu pour les Français de sortir de cette logique mortifère. 

Audiovisuel public et autoroutes : deux propositions aux effets incomparables

En ouvrant sa campagne sur l’audiovisuel public et les autoroutes, Marine Le Pen aborde deux thèmes qui parlent à ceux des électeurs qui se sentent, à raison, trahis par une gauche plus prompte à théoriser la notion de classe populaire qu’à mettre en œuvre des solutions à son service. 

L’audiovisuel public est aujourd’hui un réseau de propagande au service d’une idéologie « progressiste », repentante et anti-France, sapant la possibilité d’une conscience nationale commune au profit des particularismes et des dérives wokistes. Infiltré par une élite médiatique hors-sol, sa valeur ajoutée en tant que source d’information est faible. L’audiovisuel privé ne fait pas moins bien en termes de traitement de l’actualité, tandis que les organes de réinformation se passent de subventions publiques. Au-delà de l’aspect idéologique, la contribution à l’audiovisuel public est inique. Elle s’applique à tout foyer possesseur d’un téléviseur ou appareil assimilé, même exonéré de taxe d’habitation. Et frappe sans distinguer téléspectateurs et auditeurs ou non de ces chaînes de télé et stations de radio publiques. La réforme proposée par Marine Le Pen, simple à mettre en œuvre et effective, permettra de sauvegarder le pouvoir d’achat des plus de 27 millions de foyers qui versent cette contribution pour un montant de plus de 3,5 milliards d’euros par an. 

En ce qui concerne la moins idéologique mais tout autant symbolique « nationalisation » des autoroutes en revanche, les calculs de Marine Le Pen sur le pouvoir d’achat des Français apparaissent erronés.

Le terme de « nationalisation » en lui-même est impropre : les autoroutes appartiennent déjà à l’État, qui en délègue la gestion et l’entretien pour une durée et selon un cahier des charges déterminés par un système de concession. Il y a ensuite deux manières de comprendre le projet de Marine Le Pen. La première, une « nationalisation » faisant reposer l’entière charge des infrastructures autoroutières sur les finances publiques, en rendant les autoroutes « gratuites », est un non-sens économique. La puissance publique s’est en effet historiquement appuyée sur les entreprises privées pour développer le réseau autoroutier, en leur faisant supporter les risques économiques et techniques. Revenir sur ce système n’est ni possible, au vu de la situation des finances publiques, ni même souhaitable. Non seulement les personnes n’empruntant pas l’autoroute pour leurs déplacements paieraient pour son entretien. Mais ce système irait également à l’encontre du principe de préférence nationale : les Français paieraient pour les millions de véhicules étrangers qui utilisent le réseau chaque année. 

La seconde hypothèse, plus probable, est que Marine Le Pen veut substituer l’État aux entreprises concessionnaires pour la gestion des autoroutes. Le principe de l’utilisateur-payeur, via un système de péage, resterait inchangé. Pour la présidente du RN, ce système devrait « faire baisser de 10 à 15% le prix des péages » et augmenter les recettes de l’État d’un milliard et demi d’euros par an. Dans les faits, ce système contribuerait surtout à transférer à la puissance publique les risques de la concession, sans lui en conserver les avantages. Sur le plan technique, les autoroutes sont développées depuis des décennies par des entreprises ayant acquis un savoir-faire difficilement substituable. Sur le plan financier, le système de la concession est très avantageux pour la puissance publique, qui fait reposer l’ensemble du risque financier – endettement, risque de fréquentation – sur l’opérateur privé tout en percevant 40% du prix du péage en impôts et taxes divers. Les autoroutes sont ainsi gérées aujourd’hui de façon optimale tant pour les finances de l’État que pour celles des contribuables. Ce qui n’est pas le cas, à titre de comparaison, pour les routes nationales non concédées

En s’aventurant sur le terrain économique, Marine Le Pen a pris un risque nécessaire mais a ouvert le flanc aux critiques. Pourtant, les propositions égrenées au fil des mois font de plus en plus écho à une population française en détresse économique et sociale. Les notions de préférence nationale, souverainisme économique, protectionnisme, doivent être la colonne vertébrale de la doctrine économique de la France. En donnant une vraie cohérence idéologique et économique à ses propositions Marine Le Pen est au coude-à-coude avec un Emmanuel Macron qui semble de plus en plus fébrile à mesure que s’approche l’échéance.


Zemmour au Trocadéro : le meeting de la dernière chance

Le meeting au Trocadéro dimanche 27 mars était le dernier grand rendez-vous de la campagne présidentielle pour le candidat de Reconquête !. L'occasion pour Éric Zemmour de mobiliser son camp, alors qu'il peine à dépasser les 12% d'intentions de vote au premier tour.

Jeunes et moins jeunes étaient là, bien présents pour soutenir leur candidat. Après les interventions de Stanislas Rigault, Gilbert Collard et Marion Maréchal. Éric Zemmour sut enthousiasmer le public par des phrases choc, en assumant ses positions traditionnelles sur l’immigration et l’assimilation, et en appelant de ses vœux à une union des droites.

Emmanuel Macron, la cible principale 

De Jacqueline Moureau à Gilbert Collard, Jérôme Rivière à Éric Zemmour lui-même, le président de la République en prit plein la figure. Chacun lui reprocha sa la gestion de la crise sanitaire, de l’immigration, son refus systématique du débat, en un mot, son mépris des Français. « Il a promis un renouveau aux Français, et c’est le désenchantement qu’il leur a offert ». Et le candidat de Reconquête! d'ajouter : « Quant à Emmanuel Macron, il a passé dix ans au pouvoir auprès de François Hollande, et il ne sait toujours pas dans quel camp il est. »

Rassembler la droite

Éric Zemmour et Valérie Pécresse, donnée entre 10 et 12%, se tiennent dans un mouchoir de poche, loin derrière Marine le Pen (RN). Pour les dépasser, il lança un appel solennel à leurs principaux soutiens : « J’aurai besoin d’Éric Ciotti, François-Xavier Bellamy, Laurent Wauquiez et Jordan Bardella. Applaudissez-les ! » Un appel audacieux : les deux partis subissent de nombreuses défections depuis le début de la campagne. Dernière en date : un sénateur LR, Sébastien Meurant. Éric Zemmour se montra cinglant sur la position de ses deux concurrentes : « Valérie Pécresse est une centriste déjà prête à voter Emmanuel Macron au second tour. Marine le Pen est une socialiste en économie. » Le message est limpide : le seul candidat proposant un vrai programme de droite, c’est lui.

« J’aime l’État qui protège ceux qui travaillent »

« Nous sommes les seuls à être de droite dans cette campagne. La droite de Charles Pasqua, de Philippe Séguin. » L'orateur ponctua son discours des thématiques phares de son programme : l'assimilation, la grandeur de la culture française et de son histoire et l'autorité de l’État. Le candidat de Reconquête ! reste fidèle à ses principes d’origine : fermeté sur l’immigration, imposition juste, rigueur sur la distribution des aides sociales : « J’aime l’État qui protège ceux qui travaillent. Je veux un État qui a peur lorsqu’il prélève un euro de plus, qui réserve la solidarité nationale aux Français. »

Assimiler les musulmans

« Je respecte toutes les religions et tous les croyants. Mais j’appelle à ce que vous pratiquiez votre religion dans la discrétion. Beaucoup de compatriotes musulmans ont déjà fait le choix de l’assimilation. » Depuis le début de la campagne, Éric Zemmour expliquer sa position sur l’assimilation des musulmans : ceux qui ne souhaitent pas s’intégrer ne doivent pas tenter d’imposer leur modèle : « Si vous n’aimez pas la France, notre culture, notre peuple, notre art de vivre, et que vous ne souhaitez pas être Français, et bien, c’est votre droit. Ce n’est pas à la France de s’adapter à vous. » S'il invita ceux qui refusent l'assimilation à quitter le pays, il fit le choix d'éviter les polémiques pour se centrer sur un programme général. Le candidat demeura discret sur son ministère de la Remigration.

Des militants mobilisés

« Les sondages se trompent, je suis sûr qu’il va gagner au second tour », s’exclame Martine, 65 ans, avec son masque aux couleurs de la Normandie. Jean, jeune ingénieur parisien, renforce son soutien au « Z » après ce meeting : « Je le suivais depuis longtemps, et là, je suis encore plus convaincu qu’il représente mes idées. » Arrivera-t-il pour autant au second tour ? « On espère, mais on verra », soupire François, satisfait du meeting, mais sceptique sur les chances du candidat. S’agissant du ralliement des cadres des LR, les soutiens de Zemmour sont optimistes : « Certains se sont déjà prononcés en faveur du ralliement, mais au second tour. Vivement qu’il y ait une union des droites qui nous permette de nous débarrasser non seulement de Macron mais aussi de la macronie », confie le sénateur Stéphane Ravier, enthousiaste.

Les meetings au Trocadéro sont traditionnellement associés à deux échecs électoraux : Nicolas Sarkozy en 2012 et François Fillon en 2017. Celui d’Éric Zemmour fera-t-il exception ? Un cadre de Reconquête! veut y croire : « Aucun candidat n’aura rassemblé autant durant cette campagne, Éric peut au moins gagner quatre à cinq points. » En tous cas, le candidat put s’assurer d'une base militante plus que jamais convaincue. Mais plus qu’un noyau militant solide, ce sont les Français qu’il lui faudra convaincre dans deux semaines.


Le débat des valeurs ou énième meeting de Zemmour 

Mardi 23 mars, la rédaction de Valeurs Actuelles et l’association des Éveilleurs ont réuni au Palais des Sports de Paris des personnalités politiques de droite : Marion Maréchal et Éric Zemmour (Reconquête), Valérie Pécresse et Éric Ciotti (LR), Jordan Bardella (RN), mais aussi Marlène Schiappa ont participé à un grand débat. Ce désir initial de confrontation d’idées s’est rapidement transformé en meeting zemmourien.

Tout commence par une phrase de l'humoriste Gaspard Proust : « Dans le brief que m’ont fait les mecs de Valeurs Actuelles, ils m’ont dit ‘’il faut que tu mettes les gens à l’aise, qu’il n’y ait pas de favoritisme entre l’une ou l’autre écurie politique ; on n’est pas là pour orienter l’avis de nos lecteurs, l’important c’est qu’ils passent un bon moment et qu’à la fin tout le monde rentre à la maison en se disant ‘’au fond Zemmour a raison’’ ».

Réponse de la salle, enthousiaste : « Zemmour Président ! »

Marlène Schiappa contre l'entre-soi

Valeurs Actuelles voulait un débat d’idées ; cela plut à Marlène Schiappa, effigie du président sortant : « Je regrette que le débat d’idées n’ait pas plus de place », affirma-t-elle. « J’ai répondu à Valeurs Actuelles dans le passé, ça m’a valu pas mal d’attaques, je crois vraiment à la démocratie, je ne supporte pas l’entre-soi et je pense que quand on est qu’avec des gens avec lesquels on sait qu’on est d’accord sur absolument tout, ça veut dire qu’il faut se remettre en question parce qu’on frise la dérive sectaire. » Interrogée par la journaliste Charlotte d’Ornellas, la ministre LREM tint un discours musclé à un public aigre-doux, prompt à murmurer, voire à siffler.

Valérie Pécresse malmenée

Valérie Pécresse suscita une réaction comparable, même si elle prit soin de dire aux quelque 4000 spectateurs rassemblés sous le dôme de Paris : « Emmanuel Macron va dans des salles avec des gens triés, là on peut remarquer que je n’ai pas trié la salle. » La candidate LR souligna ses différences avec le président de la République : « Si on est là ce soir, c’est parce qu’on veut remplacer Emmanuel Macron et qu’on ne croit pas aux sondages, et qu’on ne veut pas se faire voler cette élection, ça au moins c’est un point d’accord entre nous. » Ce débat fut l'occasion parfaite pour rappeler son appartenance à la droite et réaffirmer une fois de plus « les différences colossales » entre LR et LREM.  Des « ben voyons » fusèrent dans le public.

Face à l’assemblée acquise à Éric Zemmour, Geoffroy Lejeune, directeur de VA, se fendit d'une phrase polie : « Merci d’avoir pris le risque d’affronter cette salle », lança avant que le candidat n'apparût sur la scène et qu'une ovation générale ne retentît sous le dôme de Paris. Dès la fin de son discours, beaucoup s'éclipsèrent. Comme si la soirée organisée par Valeurs Actuelles n'avait eu pour seule fin d'accueillir le candidat de Reconquête!.

 

 

 

 

 


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Emmanuel Macron, le grand gagnant de la guerre en Ukraine

Trois semaines après l’invasion de l’Ukraine, Emmanuel Macron est le favori de l'élection présidentielle, en dépit d'une campagne très courte lancée par une réunion publique à Poissy (Yvelines). Cette situation exceptionnelle inquiète ses concurrents à droite, tous à dix points derrière lui dans les sondages.

La campagne d'Emmanuel Macron est enfin lancée. Le chef de l’Etat est si débordé ! Entre les appels récurrents à Vladimir Poutine, les réunions de l’UE pour sanctionner la Russie, le président-candidat n'arrête pas. Charge aux membres du gouvernement et aux députés d'assurer sa promotion électorale. « Une situation qui n’est pas si gênante, affirme un cadre de LREM, la guerre actuelle ne fait que renforcer sa posture présidentielle qu’on lui reconnaissait déjà avant. »

Au pouvoir jusqu’au bout

On ne pourra pas lui reprocher d’avoir passé trop de temps en campagne. Jamais depuis le début de la Ve République un chef de l'Etat en exercice ne s'était présenté si tard à sa réélection. En 1962, le général Gaulle avait annoncé sa candidature au mois de novembre. En 1988, François Mitterrand s’était déclaré un 8 février, et Nicolas Sarkozy le 15 février 2012. Emmanuel Macron a confirmé son entrée en lice un 3 mars. Et malgré cette déclaration officielle, il n’a toujours pas le temps de se consacrer à sa campagne. Ce qui ne l'empêche pas d'être en tête dans les sondages, atteignant les 30% à 35% d’intention de vote au premier tour, selon les dernières estimations. Un gain de 5 à 10 points par rapport à la période précédant la crise ukrainienne.

Un président irréprochable

Malgré son échec à apaiser les tensions en Ukraine, cette guerre fut un bon moyen pour replacer le chef de l'Etat au centre du jeu. Ces dernières semaines, les candidats tous bords confondus n'ont cessé de le critiquer sur son bilan. Jusque-là, il ne pouvait se défendre que par l’intermédiaire de son équipe de campagne. Depuis le déclenchement de la crise ukrainienne, Emmanuel Macron est presque intouchable et réussit, malgré lui, à faire oublier pendant un temps les débats nationaux. De quoi provoquer l’ire des candidats de droite, en particulier d'Éric Zemmour et de Marine le Pen, sous le feu des reproches pour avoir déclaré plusieurs fois qu'ils admiraient Vladimir Poutine, devenu le diable en personne depuis trois semaines.

Une droite fragilisée par la crise en Ukraine

A peine la guerre déclenchée que les extraits d’interviews où Éric Zemmour et Marine le Pen affirmaient ne pas croire à l’invasion de l’Ukraine étaient diffusés par leurs adversaires, en particulier Valérie Pécresse. La candidate des LR, dont la campagne est au ralenti depuis son meeting désastreux du Zénith, en profita pour attaquer son adversaire de Reconquête, qui lui fait tellement peur. "Vladimir Zemmour", voilà le surnom donné au candidat qui osa soutenir Poutine et affirmer – certes hâtivement – que l’invasion de l’Ukraine par la Russie n’aurait jamais lieu. Mais début février, personne en France n’y croyait, même les plus grands spécialistes de la Russie. Les sondages montrent que Valérie Pécresse ne profite pas davantage de sa position anti-Poutine. Sa cote dans les sondages ne cesse de baisser. Le dernier sondage Ifop lui attribue 11% des intentions de vote, derrière Jean-Luc Mélenchon (11,5%), Éric Zemmour (13%) et Marine le Pen (14,5%). Sa difficulté à montrer de la conviction dans ses conférences de presse et ses meetings, son snobisme à peine voilé à l’égard d’un agriculteur voulant lui parler des défis de son métier, rendent la candidate peu sympathique. A droite, aucun candidat ne se démarque. Seul Éric Zemmour engrange encore des ralliements. Le dernier en date est celui de Marion le Pen, sans que cela ne crée de nouvelle dynamique.

Une gauche en petits morceaux

On pensait Jean-Luc Mélenchon inattaquable jusqu’à maintenant, mais la crise ukrainienne met aussi le candidat en difficulté, lui qui plaidait pour l’établissement d’une relation de confiance avec le président russe et refusait de croire à une invasion de l’Ukraine. Le Parti socialiste obligea l’équipe du candidat de La France Insoumise à se repositionner, voire à démentir toute complaisance envers le Kremlin. « C’est une calomnie », dénonça son entourage. L'épisode ukrainien ne changera sans doute pas grand-chose pour les autres candidats de gauche, évalués entre 2% et 7% des intentions de vote. Pas de quoi inquiéter le chef de LFI, fort du ralliement de la Primaire populaire, qui avait pourtant choisi Christiane Taubira en décembre dernier. La candidate ne récolta que 181 parrainages, et ne put donc se présenter.

La capacité des candidats à ramener le débat public sur des enjeux de politique intérieure pourra peut-être leur permettre de grimper avant le premier tour. Pour l’instant, tout porte à croire que le grand gagnant de 2022 sera Emmanuel Macron, malgré une campagne de courte durée.


Le bombardement de la mosquée de Marioupol suscite les contradictions

Kiev a annoncé, samedi 12 mars, qu'une mosquée abritant 80 personnes avait été bombardée dans la ville assiégée de Marioupol. Une information que nie un responsable communautaire sur place. 

En Ukraine, la ville côtière de Marioupol est stratégique pour les forces russes. Sous les bombes depuis le début du conflit, la ville est aujourd'hui méconnaissable. Il y a quelques jours, le gouvernement ukrainien annonçait que la mosquée de la ville avait été bombardée et qu'environ 80 civils étaient alors sur place. Dans un message posté sur Twitter, le ministère ukrainien des Affaires étrangères a indiqué que «La mosquée du sultan Souleïman le Magnifique et de son épouse Roxolana à Marioupol a été bombardée par les envahisseurs russes», ajoutant : «Plus de 80 adultes et enfants s'abritent là, dont des citoyens turcs». Une information rapidement démentie par le président de l'Association de la mosquée Souleiman de la ville, Ismail Hacioglu, qui explique à HaberTürk, chaîne de télévision turque, que la mosquée n'a pas été touchée. Sur Instagram, l'homme précise «Les Russes bombardent la zone qui se trouve à 2 km de la mosquée, et une bombe est tombée à une distance de 700 m de la mosquée». D'après lui, une trentaine de personnes "dont des enfants" sont sur place.

"Les Russes ne nous ont pas laissés passer"

Ismail Hacioglu tente de retrouver les citoyens turcs de la ville et de les faire évacuer. S’efforçant plusieurs fois de former un convoi, l’homme raconte que "les Russes ne nous ont pas laissé passer" aux checkpoints. Une situation que dénonce Médecins sans frontières qui a alerté sur l'état de la ville. Les habitants doivent désormais se terrer dans les caves sans aucun moyen. La vice-première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk a déclaré qu'un nouveau couloir humanitaire est prévu pour permettre aux civils de quitter la ville et de se réfugier au Nord-Ouest afin d'éviter le feu nourri des Russes. De son côté, le président de l'association de la mosquée de Marioupol a annoncé qu'il tentera "une cinquième fois" d'évacuer les familles turques.


Le Liban fragilisé par l'exode des chrétiens

Depuis l'explosion de Beyrouth à l’été 2020, le départ de centaines de milliers de chrétiens inquiète.

Ce sont près de 200000 Libanais, des chrétiens pour la plupart, qui ont fui leur pays sur les deux dernières années. L'explosion d’août 2020 toucha surtout les quartiers chrétiens de la capitale et s'ajouta à une réalité politique angoissante et bloquée. Ailleurs, la situation est moins enviable encore. Déçus par la faillite du printemps arabe de 2011, les chrétiens d’Orient virent s’éteindre leur rêve d’émancipation et de liberté. Des sunnites radicaux prirent le pouvoir. Une nouvelle occasion s'offrait aux minorités chrétiennes pour quitter la région.

Fragile équilibre

Au Liban, l’équilibre démographique demeure fragile. Pour le moment, les chrétiens représentent encore 40% de la population, le pourcentage le plus élevé du Proche-Orient. Mais celui-ci pourrait chuter si l'exode devenait massif et continu. Sur un plan social et culturel, le christianisme s'affirme comme le dernier bastion contre la régression, le dernier espoir de la modernité et de la liberté. D’où l’importance de préserver la mixité sociale et religieuse. Le pape Jean-Paul II disait d’ailleurs que l’interaction pacifique entre le meilleur de l’islam et le meilleur du christianisme était essentiel et nécessaire pour le vivre-ensemble dans ces pays-là. Il n'est pas sûr qu'il ait été entendu.


Diplomatie : le chemin de Damas est long pour Paris

Le 6 mars 2012, le Quai d’Orsay prenait la décision de rompre ses relations avec la Syrie. La France ferma son ambassade à Damas et ne reprit jamais ses quartiers dans la résidence du Djissere. Retour sur dix ans de relations tumultueuses.

« On discute avec les gens avec qui on n’est pas d’accord, ça sert à ça la diplomatie », résume Alexandre Goordazy, directeur adjoint des opérations pour l’ONG SOS Chrétiens d’Orient. Cet homme de 37 ans, au parcours déjà bien rempli, appelle de ses vœux « la réouverture de l’ambassade et la reprise d’un dialogue avec la Syrie ». C’est lui qui ouvre, en juin 2015, la mission de l’association en Syrie. Il y passera cinq ans, jusqu’à son enlèvement par des miliciens chiites. Début 2020, Alexandre et trois de ses collègues sont enlevés à Bagdad. Le calvaire dure 66 jours. Libéré grâce au covid, Alexandre rentre en France et y reste.

Depuis déjà dix ans, la France n’est plus présente en Syrie. Nicolas Sarkozy prit cette décision en réaction à la politique de Bachar el-Assad, ce qui ferma la voie à tout dialogue possible avec le pouvoir syrien. Malgré trois présidents différents, la position française ne bouge pas d’un iota. Tous considèrent que le dirigeant syrien est le principal responsable du conflit en cours.

« Ce régime doit partir »

« Ce régime doit partir », dit Nicolas Sarkozy en mars 2012 après la mort de Rémi Ochlik, photo-reporter français de 28 ans, dans un bombardement à Homs. Son mandat se termine et François Hollande prend le relais.

Le 29 mai 2012, à peine président, François Hollande n’exclut pas une intervention armée de la France en Syrie « à condition, dit-il, qu’elle se fasse dans le respect du droit international, c’est-à-dire par une délibération du Conseil de sécurité ». Ses propos ne sont suivis d’aucun acte. En réponse à l’attaque au gaz sarin du 21 août 2013, le chef de l'exécutif annonce, six jours plus tard, « chercher la réponse la plus appropriée aux exactions du régime syrien ». « La France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents », avertit le président français. Il ne se passera rien.

Il faut attendre le 27 septembre 2015 pour que la France entre dans le conflit, par le biais de l’opération Chammal. Les frappes aériennes visent les troupes et les différents bastions de l’État islamique. Elles se poursuivent jusqu’en 2019 et la perte de contrôle par Daech de ses territoires en Irak et en Syrie.

Une inflexion de la position française

À son arrivée au pouvoir, en mai 2017, Emmanuel Macron reprend la ligne rouge tracée par Barack Obama quelques années plus tôt : « toute utilisation d’armes chimiques fera l’objet de représailles et d’une riposte immédiate de la part des Français. » Il ne se passera, de nouveau, rien. Quelques mois plus tard, en septembre, il déclare : « Bachar el-Assad est un criminel, il devra être jugé et répondre de ses crimes devant la justice internationale. Mais je n'ai pas fait de sa destitution un préalable, par pragmatisme. »

Cette dernière déclaration tranche avec ses deux prédécesseurs, qui faisaient du départ de Bachar une condition sine qua non. Cette légère inflexion du pouvoir français aurait pu laisser espérer une reprise du dialogue entre les deux pays. Le 15 mars 2021, le président réaffirme, que la France reste aux côtés des Syriens pour « trouver enfin une solution politique, la seule possible ».

Une relation plus que séculaire

Dix ans après la rupture franco-syrienne, la situation semble toujours sans issue. Pourtant, la France occupe une place particulière au Proche-Orient. Depuis Louis IX et la charte de 1250, elle est régulièrement intervenue pour porter secours aux chrétiens d’Orient. Pour l’historien Jean-Louis Thiérot, cette protection instaurée par le roi est même « un marqueur essentiel de la diplomatie française ». Cette protection traverse les siècles et les régimes, y compris la laïque Troisième république. Aussi, l’entêtement de l’Elysée sur le sujet paraît d’autant plus incompréhensible.


Marine Le Pen sur LCI : championne de la droite nationale ?

Mercredi 16 février, Marine Le Pen était l’invitée de « Mission convaincre » sur LCI, rendez-vous animé par Ruth Elkrief et David Pujadas. La candidate chercha à se démarquer une bonne fois pour toute de ses concurrents du camp national.

Non, Marine Le Pen n'est pas Eric Zemmour ! A quelque 55 jours du scrutins, certains de ses électeurs pensent le contraire, comme Antonin. Pour ce Niçois, Zemmour a le même programme que sa candidate « à 90 % ». Cette proximité incita le maire de Malaussène, joli village des Alpes-Maritimes, à lâcher Marine Le Pen pour parrainer Zemmour. Parce que « la population ne la suit pas », dit-il, et que « Marine Le Pen a manqué le coup ». L’intéressée répond qu’il se trompe. Car elle est bien « en situation de gagner ». Quant à Betty, jeune retraitée et ancien Gilet Jaune, elle implore Marine Le Pen de se rallier à Eric Zemmour, « pour qu’on puisse gagner » et « sortir de cet enfer ». La candidate rétorque : « tous ceux qui croient en la France doivent se rassembler, au 1er tour on choisit, au 2nd tour on écarte », et « tous ceux qui croient en la France doivent se réunir dans un gouvernement d’union nationale. » Avant de prédire, optimiste : « tout le monde se retrouvera pour que les 5 prochaines années soient sans Emmanuel Macron ». Mais Betty, pas totalement convaincue, avoue ne pas savoir à qui donner son bulletin, d 'Eric Zemmour ou de Marine Le Pen.

Le RN et Reconquête : le loup et l'agneau

Si Marine Le Pen déplore les récents départs en cascade vers le parti d'Eric Zemmour, la candidate du RN les justifie. Nicolas Bay « ne peut plus rester à mon côté », déclare-t-elle. Refusant la déloyauté, elle préfère licencier « ces gens » plutôt que de les laisser « saboter la campagne de l’intérieur ». Pour elle, « c’est impardonnable ». Finalement, elle écarte de son mouvement ceux qui le discréditent et le dénaturent. Cela doit-il entraîner une remise en question ? Marine Le Pen s’emporte : certes non, cela serait irrationnel, « ces gens partent parce qu’ils ne veulent pas gagner », « moi je veux gagner cette élection présidentielle », clame-t-elle.

Marine Le Pen : « Je ne vais pas m’amuser au jeu des 7 différences avec Eric Zemmour »

Qui de Marine Le Pen ou d’Eric Zemmour représente le mieux le camp national ? La candidate du RN se considère la plus apte. Son concurrent de Reconquête défend l'immigration zéro. Sur ce point, elle demeure ambiguë : « 50 ans que nous alertons les Français sur le danger de l’immigration », rétorque-t-elle, en invoquant le courage dont son parti a fait preuve « depuis 20 ans ». Elle annonce ainsi avoir préparé un projet de loi très complet sur l’immigration, qu’elle soumettra par referendum. Ce projet contient, entre autres points, l’expulsion « des délinquants et des criminels étrangers » et la suppression du droit du sol, car, reprenant sans l’avouer les mots du Z, « la nationalité française doit s’hériter ou se mériter ». Concernant le regroupement familial, Marine Le Pen semble se montrer moins radicale que Zemmour : « je veux que les étudiants étrangers continuent à venir en France », mais « ils doivent repartir chez eux ensuite ». Elle annonce « une politique dissuasive d’immigration », car « on ne peut plus accueillir tout le monde ». Il y aurait deux divergences majeures avec Zemmour, selon David Pujadas : l'immigration zéro qui « n'a pas de sens » et les régularisations exceptionnelles, que Marine Le Pen dit concevoir. Et l'interrogée juge que son concurrent « n’apporte aucune plus-value à part de la brutalité ». Selon elle, la question de « la migration doit être réglée avec tranquillité ».

Eric Zemmour pourrait-il faire partie de son gouvernement si elle est élue ? Pour elle, le candidat de Reconquête ne le souhaite pas. « Je ne le mettrai pas ministre de l’Economie », ironise-t-elle. Si elle constate de nombreuses similitudes avec l’ancien journaliste, il n’y a cependant pas « une identité totale ».