L’Union européenne à l’épreuve d’une troisième vague de la Covid-19

    Le conseil européen se réunit jeudi 21 janvier 2021 par visioconférence. L’objectif principal de cette réunion est de trouver une riposte commune et coordonnée face à une épidémie qui s’intensifie sur le continent européen. C’est une nouvelle fois l’unité des 27 qui est mise à l’épreuve. 

 

 

Si l’Union européenne dispose désormais d’un vaccin contre la Covid-19, l’augmentation du nombre de cas dans plusieurs pays membres de l’organisation internationale impose aux chefs d’États et aux gouvernements  de l’Union de nouvelles concertations. 

C’est un message clair qu’a envoyé la commissaire européenne de la Santé Stella Kyriakides lors d’une conférence de presse mercredi 20 janvier 2021 en déclarant que « les vaccinations doivent s’accélérer ». 

C’est ici la lenteur de la campagne de vaccination dans plusieurs pays de l’Union, comme la France, qui est mise en cause, comparée aux campagnes de vaccination menées au Royaume-Uni ou en Israël. 

À la veille du Conseil européen, la Commission a fixé aux 27 l’objectif de 70% des adultes vaccinés d’ici fin août 2021. 

 

    « Nous avons déjà assuré assez de vaccins pour la population entière de l’Union européenne. Nous devons désormais accélérer la campagne de vaccination. » tweet la Présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen, en rappelant un objectif de 70% de la population vaccinée d’ici l’été 2021. Un objectif loin d’être atteint pour l’instant. En effet, chaque pays membre de l’UE n’est pas tenu d’acheter les doses de vaccins précommandées par Bruxelles auprès des laboratoires BioNTech/Pfizer et Moderna.

 

La santé n’étant pas un domaine de compétence exclusif ou partagé de l’Union européenne, il a été difficile pour les 27 États membres de mettre en place une action coordonnée depuis le début de la pandémie. Cependant, l’arrivée de variants du virus issus notamment du Royaume-Uni ou d’Afrique du Sud amène les puissances européennes à s’entendre autour d’une politique commune. Cette réunion par visioconférence voulue par le président du Conseil européen Charles Michel risque d’exacerber les divergences autour d’un contrôle frontalier interne et la mise en place d’un passeport vaccinal européen. 

 

Vers un retour des frontières à l’intérieur de l’Union européenne ?  

 

La question des frontières est un sujet sensible de la politique européenne. Les frontières extérieures de l’Union sont fermées en ce qui concerne les voyages non-essentiels. Seuls les voyageurs de certains pays extérieurs à l’UE peuvent venir sur le territoire d’un État membre. En revanche, les frontières entre les États membres demeurent ouvertes, même si certains gouvernements ont déjà depuis longtemps mis en place des restrictions. Par exemple, l’Italie ou la Belgique réclament la preuve d’un test PCR négatif pour toute personne qui passe la frontière de leur territoire.

Mardi 19 janvier 2021, la chancelière allemande Angela Merkel a fermement déclaré que « si les pays devaient emprunter des voies complètement différentes, ce que je ne vois pas pour le moment mais qui peut aussi être le cas, alors il faut être prêt à l’extrême et dire que nous devons aussi réintroduire les contrôles aux frontières ».

 

L’instauration d’un « passeport vaccinal » divise 

 

    Face à l’arrivée de nouveaux variants du coronavirus sur le territoire des États de l’Union européenne, l’établissement d’un « passeport vaccinal » sera discuté au Conseil européen de ce jeudi 21 janvier. Plusieurs États comme le Danemark et la Hongrie se montrent favorables à la mise en place d’un « passeport vaccinal ». Cette mesure permettrait à celles et ceux qui ont reçu les deux doses de vaccin de pouvoir prendre l’avion ou encore de se rendre dans des lieux culturels. En revanche, d’autres pays comme la France se montrent moins enthousiastes à l’idée d’un « passeport vaccinal » coordonné à l’échelle européenne. Si 62% des Français y sont désormais favorables afin de pouvoir voyager à l’étranger (sondage Ifop du 16 janvier 2021 pour lemon.fr), le ministre de la Santé français Olivier Véran avait assuré le 22 décembre 2020 qu’être vacciné contre la Covid-19 ne serait pas une condition sine qua non « pour prendre les transports en commun » ou pour d’autres activités autorisées dans ce contexte de crise sanitaire. Dans une interview accordée à l’Express, Carine Milcent, chercheuse CNRS au laboratoire Paris Jourdan Sciences Économiques avait exprimé qu’«un passeport d’immunité rendrait, de fait, le vaccin quasi-obligatoire ».

Le conseil européen de ce jeudi 21 janvier 2021 devrait aboutir à la mise en place de mesures communes afin de limiter les conséquences économiques et humaines d’une troisième vague de la Covid-19. En amont, la Commission européenne a déjà prévu la vaccination de 70% des adultes vaccinés d’ici l’été 2021. Mais les retards de livraison des doses vaccinales en Europe annoncés par les laboratoires Pfizer et Astrazeneca pourraient compromettre cet objectif. 


Saint Louis, nouveau nom d’une station de métro à … Bangkok !

À l’heure où la France rebaptise les rues de ses villes, éradiquant de la mémoire collective les plus grands noms de l’histoire de France, une station de métro nommée « Saint Louis » s’apprête à ouvrir à Bangkok, en Thaïlande.

Dans quelques semaines, les Thaïlandais inaugureront leur métro aérien. Le choix des stations de métro a retenu un nom français, celui de Saint Louis, roi de France au XIIIe siècle. Pourtant, accusé d’avoir participé aux croisades et d’avoir imposé le port de l’étoile jaune pour les juifs, Saint Louis est presque devenu persona non grata sur le sol français. Mais ce choix s’est imposé par la proximité immédiate de l’hôpital Saint Louis dans ce quartier de Bangkok.

Photo de l'arrêt de métro Saint Louis, bientôt en service.

L'hôpital Saint Louis, une oeuvre de charité d'origine française

« Là où se trouve la charité, là aussi est Dieu ». La devise de l’hôpital Saint Louis ne s’intéresse pas à des considérations historiques, mais encourage à l’amour pour les malades et les plus faibles. Depuis plus de 120 ans, l’hôpital tenu par des religieuses continue sa mission de soin de la population.

Lors de sa création en 1898, Mgr Louis Vey, prêtre des Missions Étrangères de Paris, parvient à collecter 250 000 francs et commence à construire un grand hôpital au cœur de la capitale thaïlandaise. Mgr Vey reçoit aussi un don de 100 000 francs de la part de la République laïque, mais l’on ne trouve aucun Français pour s’en offusquer.

Une station Saint Louis pour le quartier Saint Louis

L’hôpital est devenu un symbole dans la capitale thaïlandaise, si bien que lors de sa visite en novembre 2019, le pape François y a fait un arrêt. Il a alors encouragé le personnel soignant à créer une « une pastorale de la santé, où non seulement les patients, mais aussi tous les membres de cette communauté peuvent se sentir accompagnés et soutenus dans leur mission ». Le pape s’est ensuite rendu aux chevets des malades accueillis dans l’hôpital Saint Louis.

https://twitter.com/KTOTV/status/1197162847379316744?s=20

 

Côté Thaïlandais, les réactions divergent : certains déplorent que le nom choisi ne reflète pas l’identité thaïe, quand d’autres, plus pragmatiques, estiment ce choix logique puisque la station se trouve près de l’école Saint Louis, de la paroisse Saint Louis et de l’hôpital Saint Louis. Le quartier Saint Louis est donc un des signes de l'influence française en Thaïlande, notamment au travers des missionnaires catholiques.


Élections : le vote par correspondance au secours de la démocratie ?

Mardi 19 janvier, l'Assemblée nationale rendait une première décision sur la proposition de loi visant à rétablir le vote par correspondance. Le gouvernement semble encore très réticent à ce sujet.

L’Assemblée nationale a adopté mardi 19 janvier une série de retouches techniques pour les prochaines élections sans pour autant accepter le retour du vote par correspondance. Elle a cependant franchi un premier pas en autorisant cette pratique uniquement pour les détenus. Normalement les détenus doivent demander une autorisation de sortie (très rarement accordée) ou bien avoir recours à une procuration. En mai 2019, un vote par correspondance s’était exceptionnellement déroulé dans les prisons au cours des élections européennes. Une liste virtuelle et unique avait été créée pour les détenus et des espaces de vote avaient été mis en place dans les prisons. Cela avait permis à 5000 détenus de voter. Ce chiffre est quatre fois supérieur au chiffre habituel, en effet, les populations incarcérées se sentent généralement peu concernées par leur citoyenneté et votent très peu. Le chiffre reste très faible par rapport à l’ensemble du nombre de détenus (il y avait environ 50 000 détenus concernés au moment du vote).

Le vote par correspondance, une fausse bonne idée ?

Retour sur le déroulé des événements : au cours de l'été 2020, sous couvert du risque sanitaire, un certain nombre d’élus de droite comme de gauche font une proposition de loi visant à rétablir le vote par correspondance en vue des prochaines élections présidentielles. Les élections départementales et régionales à venir devaient servir de galop d’essai. L’idée est portée par le MoDem, le parti centriste de François Bayrou et allié de la majorité. Cela se passe au lendemain des élections municipales de juin qui se font remarquer par un taux d’abstention record. En raison de la crise sanitaire, une grande majorité d’électeurs n'ose pas se déplacer. La peur du coronavirus est trop forte et les résultats des élections font parfois l'objet de scandales à cause de la surprise qu’ils provoquent. En novembre 2020, la question ressurgit de plein fouet au moment même où se déroule l’élection présidentielle américaine et où un peu moins de la moitié des votes a été effectué par correspondance (environ 70 millions).

Plusieurs élus de tous bords ont donc relancé le débat en novembre forçant le ministre de l'intérieur Gérald Darmanin à s’exprimer une première fois à ce sujet :

https://twitter.com/LCP/status/1326167320222453760?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1326167320222453760%7Ctwgr%5E%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.20minutes.fr%2Fpolitique%2F2905555-20201112-regionales-2021-vote-correspondance-peut-faire-retour-france

Le ministre s'oppose donc à ce projet de loi et le confirme quelques jours plus tard dans un autre tweet:

https://twitter.com/GDarmanin/status/1327978572447944711?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1327978572447944711%7Ctwgr%5E%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.ladepeche.fr%2F2020%2F11%2F23%2Ffaut-il-revenir-au-vote-par-correspondance-9215939.php

Le vote par correspondance ne peut assurer l'anonymat, pourtant essentiel

Le problème du vote par correspondance réside principalement dans sa sincérité. Il est aisé de voter à la place d'un membre de sa famille qui s'abstient. Un électeur ne peut jamais se trouver à l'abri des pressions de son entourage au moment de glisser le bulletin dans l'enveloppe. C'est ce qu'on appelle le poids communautaire auquel l'isoloir devait justement nous soustraire. Rappelons également qu'en 1975, la France s'était débarrassée du vote par correspondance à cause de fraudes massives (Le Monde titrait le 13 novembre 1975 « Pour réduire la fraude électorale, le vote par correspondance est supprimé »). Malgré cela, les députés s’entêtent puisqu'ils ne voient dans le vote par correspondance que le taux de participation record qui a été constaté aux États-Unis. En matière d'abstention, la France bat chaque année son propre record. Le retour du vote par correspondance est donc essentiellement motivé par la peur de l’abstention.


5 slogans pour comprendre la mobilisation étudiante

Mercredi 20 janvier, quelques centaines d’étudiants ont battu le pavé à Paris pour protester contre les cours en ligne et l’absence de mesures pour les soutenir, alors que certains ne sont pas retournés en cours depuis bientôt un an. Tour d’horizon des revendications.

 

     1. « Vidal démission »

La ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, est dans le viseur de la manifestation étudiante. Les étudiants estiment que le gouvernement leur fait injustement payer la crise sanitaire. Pour Sonia, étudiante à Nanterre : « Non seulement, les étudiants ne peuvent pas retourner en cours, mais il faut aussi prendre en compte l’incertitude pour le futur, pour trouver un emploi et pour rembourser les milliards que le gouvernement distribue aux activités privées de revenus ».

 

     2. « Tout le monde déteste le distanciel »

Taux de suicide en hausse, explosion du nombre de décrochages scolaires, multiplication des difficultés économiques… Tous les indicateurs sont au rouge pour les étudiants qui clament faire partie d’une « jeunesse sacrifiée ». Devant le Panthéon, symbole de l’Université française, les manifestants respectent une minute de silence en hommage aux étudiants ne pouvant plus supporter la situation actuelle. Les logements précaires des étudiants ne sont en général pas des lieux propices à un bon apprentissage. Trop exigu, trop bruyant, trop sombre… les qualificatifs ne manquent pas pour caractériser les logements étudiants. Les manifestants semblent regretter le temps où ils passaient des heures sur des bancs en bois souvent inconfortables. Nils, étudiant à la manifestation lâche, ironique : « On n'a pas tous les moyens de se réfugier dans une maison de vacances ».

https://twitter.com/CharlesBaudry/status/1351914778357329921?s=20

 

     3. « Y a pas que les CPGE dans la vie, y a les facs aussi »

Les étudiants dénoncent le « deux poids, deux mesures » entre les formes d’enseignement. S’ils sont privés de cours en présentiel depuis fin octobre, ce n’est pas le cas de leurs camarades de Classe Préparatoire aux Grandes Écoles (CPGE) ou de BTS. Ces deux formations dépendent en effet des lycées et les cours y sont donc possibles, dans la même mesure que les cours des lycéens. Certes, les promotions sont souvent plus nombreuses à l’Université, mais les étudiants ne manquent pas de propositions. « Faire des cours en demi-groupes, organiser un roulement entre les différentes années d’étude (1re année la semaine A, 2e année la semaine B…), privilégier les amphithéâtres… L’objectif est que ceux qui le veulent puissent revenir à la faculté, tout en respectant les protocoles sanitaires » propose Éric, étudiant de la Sorbonne.

 

     4. « Rendez-nous nos étudiants »

Le cortège est majoritairement composé de jeunes de 18 à 25 ans, mais certains professeurs font aussi connaître leurs revendications. Mathilde, enseignante à Paris IV, brandit une pancarte où l’on peut lire « Rendez-nous nos étudiants ». Pour elle, la transmission de la connaissance, le cœur de son métier, est véritablement amputé par l’absence de liens avec ses étudiants. Elle est présente pour soutenir ses élèves, qu’elle souhaite revoir ni en visio, ni dans la rue, mais bien dans un amphi.

https://twitter.com/Alexandre5412/status/1350361792095072256?s=20

     5. « Facs ouvertes aux enfants d’ouvriers, Facs fermées aux intérêts privés »

Solidaires, le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), l’UNEF étaient parmi les principaux syndicats qui appelaient à manifester ce mercredi 20 janvier. Les étudiants tenaient aussi des drapeaux rouges, siglés « Jeunes Communistes de France ». De nombreux tracts circulaient dénonçant la politique gouvernementale, plus largement que la seule gestion des étudiants pendant la crise. Certaines personnalités politiques, plutôt à gauche de l’échiquier politique, se sont joints au début du cortège, comme Esther Benbassa, sénatrice EELV (Europe Écologie les Verts). À l’Assemblée, le député François Ruffin a lancé un appel le 13 janvier, en demandant au gouvernement de rouvrir les facultés. Mais pour l’instant, ni la mobilisation de rue, ni les appels des députés n’ont décidé le gouvernement à permettre aux étudiants de revenir à l’Université.


La vaccination enfin ouverte aux plus de 75 ans

Depuis trois semaines, des pays étrangers pointent la lenteur de la campagne de vaccination française. Pour pallier les critiques, le gouvernement s'est résolu à simplifier les démarches pour les personnes de plus de 75 ans.

Au 17 janvier, la France annonce plus de 400 000 personnes vaccinées, alors que la plupart de nos voisins européens dépassent largement le million. Notre retard s'explique par le choix de répartir les vaccins dans la population. Les premières doses étaient réservées en priorité aux professionnels de santé ainsi qu’aux sujets à risque. Mais les consignes semblaient si vagues que de nombreuses personnes se croyant concernées se mirent à engorger les centres de vaccination. Pour se rattraper, les autorités ont décidé d'anticiper la phase II du plan de vaccination. 5 millions de Français sont concernés.

Consentement écrit

Annoncée à l’origine pour début février, la phase II a commencé aujourd’hui. Toutes les personnes de plus de 75 ans peuvent prendre rendez-vous pour aller se faire vacciner. Les procédures sont simplifiées pour ne pas renouveler les atermoiements de la première phase. Il faut toujours un consentement écrit. En revanche, la consultation du médecin traitant est désormais facultative pour se faire administrer la première dose du vaccin Pfizer. Les médecins des centres de vaccination disposent d'un questionnaire pour identifier les risques courus par chaque patient.

Une meilleure anticipation

Prendre rendez-vous était possible depuis le 14 janvier. Les sites spécialisés (Doctolib, Maiia et Keldoc) ont mis en place des procédures simplifiées pour aider les personnes âgées dans leur démarche. Le gouvernement a également promis d’ouvrir de nouveaux centres de vaccination. D’ici à la fin du mois, 600 établissements devraient couvrir l’ensemble du territoire national. Chaque personne vaccinée se verra inscrite au « dossier Vaccin Covid », ce qui permettra de compter et de tracer les vaccinations. La deuxième dose doit être reçue au moins trois semaines après la première. La phase III de la vaccination devrait concerner les plus de 65 ans mais les dates comprises entre février et mars sont encore incertaines à ce jour.


Affaire Mila

Un an après l'affaire Mila : vivons malheureux, vivons cachés

Le Figaro publie une enquête sur Mila ou « la vie clandestine d’une adolescente victime de la haine islamiste ». Il y a un an, cette jeune fille avait vivement critiqué l'islam sur les réseaux sociaux, alors qu'elle répondait aux insultes de plusieurs internautes. Harcelée par des musulmans radicaux, elle vit la peur au ventre et demeure le symbole meurtri de la liberté d'expression.

Tout commence le 18 janvier 2020, lorsque sur Instagram, Mila est victime de propos homophobes. S'ensuit une vidéo virulente où elle affirme détester le Coran : « Il n’y a que de la haine là-dedans, l’islam, c’est de la merde, c’est ce que je pense. » Sa vidéo est rapidement partagée sur les réseaux sociaux. La jeune adolescente devient la cible de milliers de messages d’insultes et de menaces de mort. Abdallah Zekri, délégué général du Conseil français du culte musulman, ajoute même : « Qui sème le vent, récolte la tempête ! » Plus récemment, certains lui prédisaient le même avenir que Samuel Paty. Au total, elle recevra plus de 50000 messages de haine.

Mila, une vie dans la clandestinité

Depuis lors, sa vie a basculé. Après avoir dû quitter son lycée de l’Isère, l'adolescente a appris qu’elle ne pourrait plus suivre ses cours dans le lycée militaire qui l’avait accueillie. Selon l’enquête du Figaro, Mila est aujourd’hui « sous haute protection policière, instruite à domicile ». Pour son avocat, Me Richard Malka, « elle vit comme les gens de Charlie Hebdo, dans la clandestinité ».  Alors même que Mila exerce légalement sa liberté d'expression, elle est contrainte de vivre cachée contrairement à ceux qui la menacent. Certains ont été arrêtés, mais l'adolescente continue de recevoir « une trentaine de messages haineux à la minute ».

À cause de cette menace islamiste, la jeune fille voit son rêve de chanter sur scène s’envoler. Dans Je ne veux pas mourir, Mila chante « pour un blasphème je ne vivrai jamais comme avant. À vrai dire je ne sais même pas si je vais vivre encore longtemps ».

Islam et blasphème

Cinq ans après les attentats de Charlie Hebdo, cette affaire relance le débat sur le blasphème en France. Nicole Belloubet, alors garde des Sceaux, ira jusqu’à déclarer que « l'insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience », avant de regretter ses propos. Ce discours vient soutenir une tendance inquiétante chez certains jeunes issus de l'immigration. Laurence Croix, maître de conférence à l’Université de Nanterre, constate dans les pages de Charlie Hebdo que « cette année, après l’affaire Mila et le meurtre barbare de Samuel Paty, des jeunes ne comprennent pas que l’on puisse critiquer la religion ».

Le droit au blasphème n'existe plus en France depuis la loi sur la liberté de la presse de 1881. L'adolescente a excercé sa liberté d'expression, comme l'humoriste de France Inter, Frédéric Fromet qui, quelques jours avant Mila, avait entonné Jésus est pédé. Les propos de la jeune fille ne peuvent être poursuivis en justice car elle critique l'islam, et non les musulmans. Ainsi, comme le rappelle Me Malka, Mila « n’a fait qu’exercer son droit à la critique de la religion », à l'instar de Frédéric Fromet, des journalistes de Charlie Hebdo ou encore de Michel Houellebecq.

Malgré tout, Mila ne reçoit pas un soutien unanime, notamment à gauche. Les « Je suis Charlie » de 2015, Ségolène Royal et François Hollande à leur tête, semblent avoir délaissé leurs idéaux. Pendant ce temps, une jeune fille de 16 ans vit dans la peur et sait qu'elle ne retrouvera sûrement jamais une vie normale.


À Paris, des milliers de personnes « marchent pour la vie »

Quelques milliers de manifestants se sont rassemblés place du Trocadéro à 15h dimanche 17 janvier pour la « Marche pour la vie ». 46 ans après la promulgation de la loi Veil, dépénalisant l’avortement sous conditions en 1975, ils s'affirment « pro-vie » et dénoncent le recours abusif à l'interruption volontaire de grossesse.

 

« La vie est toujours une bonne nouvelle » lance Pascale Morinière, présidente des Associations Catholiques de France depuis un podium situé place du Trocadéro. Des milliers de voix lui répondent par une clameur d’approbation en ce dimanche 17 janvier après-midi. Les manifestants de « la Marche pour la vie » réaffirment leur opposition à l’avortement, comme ils le font depuis 2005.

 

Les organisateurs ont annoncé 5000 personnes rassemblées sur place et plusieurs milliers sur… Zoom. En effet, suite aux restrictions sanitaires, la manifestation parisienne était doublée d’une manifestation virtuelle. Les militants de toute la France étaient invités à se connecter sur la plateforme, pour suivre les interventions sur le podium et participer ainsi à la « Marche pour la vie ».

 

https://twitter.com/MarchePourLaVie/status/1350819329126899712?s=20

La loi bioéthique prochainement débattue au Sénat

« Nous marchons pour la vie, car il y a deux propositions de loi qui la menacent actuellement », a expliqué Nicolas Tardy-Joubert, président du mouvement « Marche pour la vie ». En effet, deux textes de lois sont dans le viseur des manifestants. Le premier texte est une proposition de loi de la députée Aurore Gaillot qui permet l’avortement à 14 semaines, au lieu de 12 semaines actuellement. Examiné à partir du 20 janvier, le texte prévoit aussi la suppression de la clause de conscience, permettant au personnel soignant de refuser de pratiquer une interruption médicale de grossesse au nom de la liberté de conscience.

 

Le second texte est le projet de loi bioéthique, dont le parcours législatif a commencé en septembre 2019 et a été interrompu à cause de la pandémie de coronavirus. Toutefois, ce projet de loi sera examiné le 19 janvier au Sénat, et prévoit l’autorisation de l’avortement pour cause médicale jusqu’au neuvième mois.

https://twitter.com/AlbaneGaillot/status/1349277349687275520?s=20

« Stop aux embryons supprimés », «Non à l'avortement »

250 000 avortements sont réalisés chaque année en France. Un chiffre que ces « marcheurs pour la vie » trouvent scandaleusement élevé. En fin d’après-midi, des manifestants revêtus de sacs poubelles ont arboré des masques de poupons avec le message « bébé avorté = humain à la poubelle ». D’autres portaient des panneaux avec divers slogans : « Protéger le faible, ça c’est fort », « Maman, papa, laissez-moi naître » ou encore « Stop aux embryons supprimés ».

 

Critiqué comme un rassemblement d’arrière-garde, le cortège de manifestants dénombrait pourtant de nombreux jeunes parmi ses rangs. Plusieurs associations comme « Stop au porno » ou « les Éveilleurs » tenaient des stands pour faire connaître leur action. La fondation Jérôme Lejeune, finançant la recherche pour soigner la trisomie 21, tenait un rôle important, comme principal partenaire de la « Marche pour la Vie ».

 

Les manifestants tiennent un discours détonnant en affirmant que le droit à l’avortement est un recul de la société. Mais leur but est de réveiller les consciences et de faire bouger les lignes. Objectif réussi ? Un sondage du 7 octobre 2020 montrait que 92% des Français estiment qu’un avortement laisse des « traces psychologiques ». De quoi galvaniser ces militants pro-vie.


En 2022, Molière entrera-t-il au Panthéon ?

Le 15 janvier 1622, naquit Jean-Baptiste Poquelin, alias Molière. L'année prochaine, la France fêtera les quatre cents ans de naissance du dramaturge. Selon Francis Huster, il faut fêter l'anniversaire par l'accueil d'un des Pères de la Langue française au Panthéon. 

Le 12 janvier, Francis Huster, sociétaire de la Comédie-Française, écrivit une lettre adressée au Président de la République jointe d'une pétition déjà signée notamment par Stéphane Bern, pour encourager l'intronisation de Molière au Panthéon. En voici un extrait :

"Parce que Molière aura honoré la France en lui offrant depuis quatre siècles d’incomparables moments de rire libérateur, de courage humaniste, de pure tendresse humaine devenus les drapeaux d’âme de notre République, (...) j’ai voulu au nom de tous ceux, par millions depuis quatre siècles dans tous les pays, à travers les continents, qui l’ont aimé et servi, par les milliers de mots de ce texte, officiellement ouvrir la page sur laquelle sera inscrite (...)  l’entrée de Molière au Panthéon, à l’occasion du 400e anniversaire de sa naissance, le 15 janvier 2022."

Molière au Panthéon, un symbole national et international

Les gens de culture commencent à se mobiliser pour, finalement, préparer un hommage national sortant de l'ordinaire et rassembler dans la nécropole républicaine les restes d'un Français remarquable. Dans le monde entier, le français est qualifié de "langue de Molière". Dans son dernier livre, Molière mon Dieu, Francis Huster souhaite "rendre justice" au génie du théâtre français. Il continue :

"En France, la statue de Molière n'est même pas devant la Comédie-Française. Si je n'y arrive pas, ce sera l'échec de toute une vie. J'ai de l'admiration pour ceux qui sont entrés au Panthéon, de Zola à Jean Moulin en passant par Simone Veil mais je pense qu'il manque au Panthéon justement la voix du peuple".

Statue en or du Molière, qui récompense tous les ans, les meilleurs acteurs français

Le Panthéon et les hommes de Lettres

Actuellement au Panthéon, il se trouve de nombreuses plaques commémoratives avec des centaines de noms d'écrivains, mais seulement sept tombeaux d'écrivains y sont présents : Voltaire, Rousseau, Resnier, Hugo, Dumas, Zola, Genevoix. La dépouille de Molière repose depuis 1817 au Père Lachaise, avec celle de La Fontaine.

   Tombeaux de Molière et de La Fontaine, au Père Lachaise (Paris XXe)

Nombreux sont ceux qui rêvent de voir de nouvelles plumes reposer dans la nécropole : Rimbaud, Verlaine, La Fontaine, Proust... La file d'attente s'allonge peu à peu.

Molière, un Grand Homme ?

Cette initiative fait débat. Il revient au Président de la République de trancher. Il est le seul à détenir le pouvoir, par décret, d'introniser un Français au Panthéon.

Le Président, amoureux des vers de Molière, se laissera peut-être convaincre... En 2005, il en déclamait spontanément des vers par cœur.

https://www.dailymotion.com/video/x37ojnc


Ligue 1 : Canal + rend ses droits TV et réclame un appel d'offres

La peur de l'écran noir à partir du 05 février pour le football français commence à faire surface. En effet, la chaîne Téléfoot ne diffusera plus la Ligue 1 suite à son défaut de paiement auprès de la Ligue de Football Professionnelle. De son côté, Canal+ estime que la L1 est trop chère et va donc rendre ses droits TV actuels.

 

Les Français commencent à redouter ce fameux 05 février. Cette date pourrait signer la fin de la diffusion des matchs de Ligue 1 et de Ligue 2. En effet, Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal +, a annoncé qu'il allait restituer ses propres droits sur la Ligue 1, à savoir les matchs du samedi à 21h et ceux du dimanche à 17h. De plus, il souhaite et réclame le lancement d'un nouvel appel d'offres pour la totalité des droits TV du championnat de France de football. Selon lui, la Ligue 1 a perdu beaucoup de valeur : « Mediapro a fait la démonstration que la L1 ne valait pas 1,156 milliard d'euros. Côté Canal+, nous pensons que la Ligue 1 est subventionnée depuis de nombreuses années. Aucun diffuseur n'a réussi à la rentabiliser » . 

Cette situation exceptionnelle inquiète profondément les présidents de club. En effet, aucune rentrée d'argent ne leur est possible. La crise sanitaire actuelle empêche les clubs d'ouvrir les billetteries et les sponsors n'ont pas envie de payer car aucune communication n'est possible et la visibilité est nulle du fait des huis clos dans les stades. La seule rentrée d'argent pour les clubs Français sont les droits TV…

 

Téléfoot continuera la diffusion des matchs jusqu'au 31 janvier… ou plus…

Même si Canal+ souhaite le lancement d'un nouvel appel d'offres, le groupe Mediapro, avec sa chaîne Téléfoot, continuera la diffusion des huit matchs jusqu'au 31 janvier même si le groupe sino-espagnol a rendu ses droits à la Ligue de Football Professionnelle (LFP), faute de paiement. Le temps donc de trouver un nouveau diffuseur, Téléfoot assurera les huit matchs jusqu'à la fin du mois.

Seulement, le souhait de Canal+ d'obtenir un appel d'offres sur l'ensemble des droits TV de la Ligue 1 et de la Ligue 2 va prendre beaucoup temps, a minima 3 mois. Il n'est donc pas impossible que la LFP signe un avenant avec la chaîne Téléfoot pour que celle-ci puisse continuer à diffuser au-delà du 31 janvier en attendant qu'un terrain d'entente soit trouvé entre toutes les parties prenantes.

 

Aucun autre diffuseur en vue ?

L'appel d'offres voulu par Canal+ laisse entrevoir une diminution drastique des droits TV de la Ligue 1. En effet, cet appel d'offres remet tout naturellement en jeu les gains de Médiapro (environ 800 millions d'euros), mais aussi ceux de Canal+ (330 millions d'euros). Seulement, peu de diffuseurs seraient en capacité d'investir autant sur le football français. On pense notamment à des diffuseurs comme RMC Sport, Amazon ou bien même Netflix.

Le football français commence l'année 2021 comme il avait terminé l'année 2020, avec des incertitudes concernant la diffusion du football professionnel.


L'Éducation nationale prise en flagrant délit de discrimination

Le baccalauréat qui était déjà en pleine refonte a subi de nombreuses réformes d'urgence à la suite de la pandémie. Désormais le fameux diplôme s’obtient presque exclusivement en contrôle continu et un grand oral final vient le parachever en fin d’année. Les consignes de notation de cet ultime examen ont suscité de vives réactions après avoir été distribuées aux enseignants.

C’est sur le compte Twitter d’un professeur de philosophie que le scandale éclate : la grille d’évaluation du grand oral est révélée au public. On peut y lire que le ministère de l'Éducation nationale demande de noter des aspects qui se rapportent à la personne et non plus au travail fourni. L’élève se voit ainsi jugé sur sa voix « perçante », « criarde » ou encore « nasillarde » ainsi que sur sa « tenue vestimentaire » et son « déhanchement ».

https://twitter.com/trineor/status/1334079412040593408

https://twitter.com/trineor/status/1334079422584991744

L'Éducation nationale en tort

Pour le professeur de philosophie, la situation est très grave car il s'agit de discrimination. Selon lui, l’Éducation nationale n'a pas à demander aux enseignants d'évaluer sur ce type de critères. Le tollé suscité par cette injonction va finalement aboutir à une refonte de la grille d’évaluation discriminatoire du grand oral. Le tout sera accompagné d’une réécriture des archives par le ministère de l’Éducation nationale pour éviter de laisser des traces gênantes. Aujourd’hui on distribue aux professeurs un tout autre fichier beaucoup plus succinct.

Le grand oral deviendrait discriminant

La grille polémique a donc été reléguée au rang de document de formation et non plus de fiche d’évaluation avant d’être définitivement supprimée car la discrimination y était trop flagrante. C’est finalement la grille québécoise qui vient remplacer le document en tant que « ressource proposée », ce qui signifie qu'elle ne constituera pas une grille d’évaluation mais un document support. On remarque toutefois qu’on peut encore y trouver des propositions de notation sur des aspects qui n’ont rien à voir avec un quelconque travail d’étudiant.

https://twitter.com/trineor/status/1334161969444634624

 

À moins de croire que les formations déjà effectuées par l’Éducation nationale n’auront aucun impact sur les notations des professeurs, il est légitime de penser que les élèves vont probablement subir des discriminations lors du grand oral. Le doute est largement renforcé lorsqu’on lit le document support québécois. Malheureusement le mal est fait, car c’est bien avec ce support que l’Éducation nationale a déjà formé un grand nombre de ses enseignants.

Sur Twitter, les réactions du professeur de philosophie pointent du doigt l'aspect discriminatoire des consignes d'évaluation :

« Toutes ces petites horreurs sont dans la plus stricte continuité de la transformation progressive des écoles en succursales de recrutement pour les entreprises qui est à l’œuvre depuis des années - mais depuis J-M Blanquer, avec une accélération affolante . »

« Qu’un élève soit avenant, sympathique, souriant, ait de l’humour, on est tous capables d’apprécier cela. […] Mais en faire des compétences exigibles et évaluables, est-ce le rôle de l’école ? »

« Le simple fait qu’on demande à des enseignants d’inspecter si les élèves sourient assez, ne se déhanchent pas, sont assez propres, ne portent pas d’habits courts ou trop moulants, parlent sans accent ou ont de l’humour, me paraît sincèrement effrayant. »

« Dans un  État normal, cela devrait suffire à soulever des protestations considérables »

« Ce sont des items transmis par l’Éducation nationale. Beaucoup d’élèves seront donc jugés sur cette base »

 

La pandémie avait déjà causé de nombreux torts aux élèves en donnant le baccalauréat sur seul contrôle continu. Il reste désormais à attendre le fameux grand oral, supposé rééquilibrer les chances. Mais avec de pareilles consignes, il pourrait bien augmenter encore le fossé entre les « bons » élèves (certifiés conformes) et les autres.


Place Saint-Pierre : la crèche de Noël laisse perplexe

Vendredi 11 décembre était inaugurée place Saint-Pierre la traditionnelle crèche de Noël. Traditionnelle ? Cela se discute. Faite de personnages raides et impassibles, l'installation géante dégage une certaine froideur peu propice à l'émotion.

D'habitude, dans la crèche, Marie et Joseph à genoux se penchent tendrement sur l'Enfant Jésus. Cela fait partie des codes implicites indispensables. Cette représentation aurait-elle vécu ? Le Covid serait-il passé par-là au point d'imposer une rigidité totale à des figurines transformées en colonnes, comme le fut Seth en statue de sel ? La crèche aurait-elle pris acte de la très pénible restriction infligée à nos relations sociales les plus élémentaires ? En tout cas, les personnages sont droits, cylindriques, réalisés par montage de modules annulaires en céramique. Leur posture n'est pas un accident. La superposition des modules empêche toute courbure des silhouettes, d'où cette raideur à laquelle on n'est pas habitué, comme si les acteurs de cette scène fondatrice de l'ère moderne ne manifestaient que de l'indifférence les uns pour les autres.

Émotion, es-tu là ?

Ce qui laisse perplexe, c'est l'absence d'émotion. S'agit-il d'une opinion ? Peut-être. On vous laisse juge. Dans la plupart des églises, les catholiques aiment à contempler des statues finement sculptées : le courage de Jeanne d'Arc, la piété du curé d'Ars, la tendresse de Marie, la force, la douceur ou la souffrance de Jésus sont autant d'invitations à la prière. Pour les santons, c'est un peu la même chose. Cette tradition récente permet aux fidèles de créer leur propre crèche de Noël. Quoique petits, les santons présentent des visages multiples, pieux, ravis ou besogneux. Bref, ils expriment une émotion et en cela, ils touchent le cœur des gens. La crèche n'a d'ailleurs aucun autre but que celui-ci : provoquer une émotion.

Innovation et tradition ne s'opposent pas

Depuis quelque temps, le Vatican profite de la crèche de Noël pour mettre à l'honneur différents savoir-faire. L'an dernier, la crèche accueillait des personnages entièrement en bois, travaillés selon la tradition du Trentin, province sinistrée par des orages. En 2018, le Vatican dévoilait une crèche en sable, inspirée des traditionnelles sculptures de Jesolo (Vénétie). L'année précédente, Naples était à l'honneur. Des enfants atteints du cancer ou originaires de régions frappées par les séismes l'avaient décorée. Cette année, la crèche du Vatican vient de Castelli, village des Abruzzes (centre de l'Italie) spécialisé dans la céramique. La facture contemporaine fait référence à des arts plus anciens. Aussi l'innovation ne s'oppose-t-elle pas à la tradition : elle l'enrichit, l'actualise, la rend vivante. La question n'est pas là. La vraie question, c'est : la crèche transmet-elle une émotion où le naturel, dans sa simplicité, se mêle au surnaturel, dans sa limpidité ?


Arménie : l'automne meurtrier

Depuis cinq ans, sous l'impulsion de l'ONU, le 9 décembre est la journée internationale de commémoration des victimes du crime de génocide. L’occasion de parler de la seconde guerre du Haut-Karabagh, territoire peuplé à 95 % d'Arméniens et que revendiquait l'Azerbaïdjan. Il y a un mois, les forces d'Erevan était battues par leurs rivales azéries au point que Bakou qualifia cette défaite de "capitulation". Depuis le 10 novembre, Moscou impose un cessez-le feu dans la région.

« Chacun ne meurt qu'une fois, mais heureux qui se sacrifie pour libérer sa nation. » L’hymne national d'Arménie résonne douloureusement. Le conflit du Haut-Karabagh fait revivre à ce petit pays du Caucase, première nation chrétienne, des épisodes tragiques.

Le 10 novembre, un accord est conclu entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, avec l’appui tutélaire du président russe Vladimir Poutine. Cet accord met fin à un conflit armé entamé le 27 septembre. L’enjeu des combats : le territoire de la République auto-proclamée du Haut-Karabagh. L’accord favorise l’Azerbaïdjan, le vainqueur militaire du conflit. Les populations locales, durement touchées, sont condamnées à l'exil.

« Je ne peux pas laisser ma maison aux Turcs »

Cet épisode n’est pas sans rappeler le génocide vécu en 1916. En pleine guerre mondiale, les nationalistes turcs firent périr 1,3 million d'Arméniens. De nombreuses autres victimes furent vendues comme esclaves, abusées sexuellement ou mutilées. Si cet événement est sans commune mesure avec la guerre du Haut-Karabagh, un parallèle peut  s’avérer utile :

Tout d’abord, en cet automne meurtrier, on retrouve la volonté d’exterminer. 4000 tués, dont la moitié de civils, et 8000 blessés. Mais les conséquences les plus durables, c'est le remplacement de la population. Des Arméniens incendient leurs propres maisons. L’un d’eux explique : « Je ne peux pas la laisser aux Turcs. »

Et il poursuit : « On a aussi bougé la tombe des parents, les Azerbaïdjanais vont se faire un malin plaisir à profaner nos tombes, c'est insupportable. » Beaucoup d'Arméniens retournent sur leurs terres mais d'autres, craignant d’être marginalisés voire humiliés, refusent. Ils se retrouvent dans un territoire devenu azerbaidjanais, avec toutes les incertitudes que cela soulève. Une mère de 3 enfants dit ainsi : « Je ne veux pas reconstruire une maison, si c’est pour qu’une autre guerre éclate et que nous devions tout quitter à nouveau. » Les relations entre les habitants de ces zones disputées risquent de se tendre, avec une cohabitation qui reste à inventer.

Peu de soutien international

Pas plus que la Turquie en 1916, l’Azerbaïdjan en 2020 n’a d’égards pour les populations victimes ou exilées. Malgré les manifestations en Arménie et un peu partout dans le monde, les échos internationaux sont très faibles. Seul le Sénat français peut se féliciter d'avoir voté une résolution demandant à l'exécutif de reconnaître la République autoproclamée du Haut-Karabakh. C’est la seule institution à être allée si loin, puisque même l’Arménie ne l'a pas reconnue ! Cette résolution aura le mérite d'attirer l'attention sur le sort des Arméniens soumis aux velléités expansionnistes de Bakou.

Cet automne, beaucoup de jeunes arméniens prirent les armes pour défendre leur identité. Leur courage fit face à la puissance de l’Azerbaïdjan, rentier du pétrole et du gaz, soutenu par la Turquie d'Erdogan, sergent-recruteur du djihadisme international. Dans ce conflit, Vladimir Poutine préfère s'entendre avec son grand sud dominé par l'islam turcophone chiite plutôt qu'avec un confetti chrétien sans grand intérêt stratégique.

Cet accord du 10 novembre apparaît comme une revanche azérie. Il prévoit la rétrocession à l’Azerbaïdjan d’une majorité de territoires conquis par l’Arménie lors de la première guerre du Haut-Karabagh (1991-1994).